« Le maire veut détruire Le CAP », Mohamed Beldjoudi, fondateur de cette salle de spectacle

 « Le maire veut détruire Le CAP », Mohamed Beldjoudi, fondateur de cette salle de spectacle

Mohamed Beldjoudi à l’inauguration du local de campagne de Alain Amédro à Aulnay-sous-Bois


 


Samedi 30 janvier.  Il est 23h. Le concert Origines Contrôlées des deux frères "Mouss et Hakim" (chanteurs du groupe Zebda) s'achève.  "Il faut garder le cap. Et continuez à résister", lance à la foule à  plusieurs reprises Mouss. Un message adressé aux employés de ce lieu mythique, une salle de spectacle installée depuis 15 ans au plein cœur de la cité des 3000 à Aulnay-Sous-Bois  (93 ). 


 


Le maire LR, Bruno Beschizza, ancien officier de police, très connu du monde médiatique, a annoncé dernièrement qu'il souhaitait modifier la programmation du Cap parce qu'il la juge "trop élitiste". Plusieurs concerts ont d'ores et déjà été annulés. Une décision controversée prise parce que "les habitants de la ville ne fréquentent pas cette salle", précise l'entourage du maire joint au téléphone. Comment le savent-ils ? "C'est simple : le fait que nous soyons obligés d'avoir des agents de sécurité pour protéger cette salle, montre bien que les habitants des quartiers n'aiment pas ce lieu", expliquent-t-ils. 




Un argument "peu convaincant", qui a fait bondir Mohamed Beldjoudi, le fondateur du Cap qui travaille désormais dans une ville voisine de Seine-Saint-Denis. "En 15 ans, il y a eu un incident. Un seul", peste Mohamed Beldjoudi. "C'était lors du concert de Soprano en 2007 (NDLR; le 7 avril plus exactement). Mais ce genre d'événements peut malheureusement arriver partout", détaille Mohamed Beldjoudi.



"En vérité, ils veulent détruire le Cap. Le faire disparaître. Qu'il devienne un banal équipement de quartier", continue-t-il encore. "Une programmation élitiste ? Mouss et Hakim, Blacko, Eric Bibb & Jean-Jacques Milteau, Kass Mady Diabate font ils partie d'une programmation élitiste ?", interroge  encore Mohamed Beldjoudi.  



L'entourage du maire "aimerait que cesse la polémique". "La municipalité ne souhaite pas une mise à mort du Cap", assure l'entourage du maire. "Pour preuve: les subventions municipales qui sont passées de 1,1 M€ en 2014 à 930 000 € en 2015. Cela équivaut à une baisse de 14% et non pas de 30%, comme peuvent le dire certains". 



Malgré ces propos qui se veulent rassurants, l'association Vivre mieux à Aulnay-sous-Bois est également très inquiète de la tournure des événements. "Les habitants, particulièrement ceux des quartiers populaires, doivent pouvoir accéder à une programmation exigeante et non au rabais", écrit l'association dans une lettre ouverte adressée au maire. Ajoutant "qu'on devrait se féliciter qu'il y ait quelques Parisiens qui repartent avec une autre image de notre ville". 



A quelques encablures d'Aulnay-Sous-Bois, le Blanc Mesnil. La ville  est passée à droite en 2014, après avoir été gérée 80 ans par les communistes. Là-bas, certains militants de gauche, comme Zouina Meddour, "ne sont pas dupes". "Le maire du Blanc Mesnil avait tenu le même discours quand il s'est attaqué au "Forum" en 2014", rappelle-t-elle. "Il disait que cette salle était "trop élitiste".  Résultat : en un an, il a mis fin au projet artistique de ce lieu", avance-t-elle encore. "Le conseil municipal a décidé d'arrêter  de verser la subvention (NDRL: 1,8 millions d'euros) à l'association qui gérait la salle de spectacle", continue Zouina Meddour. "Et vingt salariés se sont retrouvés à la porte", regrette-elle.  "Le Forum a été remplacé par le Théâtre 9 avec un programme très diminué, sans aucun projet culturel sur le territoire, où il n'y a plus de compagnie en résidence, plus de création. C'est ce qu'il risque de se passer à Aulnay-sous-Bois", conclut dépitée Zouina Meddour. 


 


Nadir Dendoune

Nadir Dendoune