« I AM with them » : redonner une identité à chaque réfugié

Poussés hors de leurs frontières par la guerre ou la pauvreté, ces hommes, femmes, enfants risquent leur vie pour atteindre l'Europe dans l'espoir d'une meilleure existence. Au centre d'enjeux politiques, ceux dont on ne parle qu'à travers des chiffres ont chacun un parcours, un visage, une vie. Dans son exposition « I AM with them » qui débute aujourd'hui à l'institut du monde arabe, la photographe Anne A-R redonne une identité à chacun d'entre eux.

Manifeste photographique

C'est au mois d'août dernier que le déclic s'est produit dans la tête de la réalisatrice et photographe Anne A-R. Alors que sur tous les écrans tournaient en boucle les images et reportages consacrés à la mort de migrants asphyxiés dans la remorque d'un camion frigorifique en Autriche, l'artiste était horrifiée de voir l'approximation dans le décompte du nombre de morts. Une vague, une masse, des chiffres. Afin de mettre en avant les destins individuels la photographe est partie « sur la route de l'exode de la Grèce à l'Allemagne » pour les rencontrer, leur parler, les photographier. Ainsi, en octobre dernier, Anne A-R prend des clichés des réfugiés, raconte leur histoire et les diffuse, au rythme de trois par jour, via les réseaux sociaux.

Redonner de l'humanité

Remettre les parcours individuels, les histoires humaines au centre et traiter les réfugiés un par un. Ils s'appellent Selim ou encore Rania. Ils posent devant l'appareil photo, esquissant parfois un sourire, plantant leur regard droit dans l'objectif, parce que les yeux ne mentent pas et témoignent d'un parcours long, sinueux et dangereux. Pour obtenir ce résultat, cette connivence avec les réfugiés, Anne A-R explique avoir de nombreuses heures à parler avec chacun avant de les photographier. Un réel intérêt pour l'individu, pour son parcours, un acte qui redonne un peu d'humanité à ces personnes, considérés par certains hommes politiques européens, et français, comme un fardeau dont nul ne sait que faire et que l'on repousse tant bien que mal vers les portes de l'Europe. « C’est inhumain ce qu’on leur fait subir (…) On continue à penser que l’accueil des réfugiés est une urgence administrative mais la seule urgence qui soit est humanitaire » s'indignait la photographe, fin 2015, au micro de France 24. Le travail photographique de cette dernière permettra peut-être de reconsidérer la façon dont sont vues ces victimes d'un drame humain.

F. Duhamel

« I AM with them » d'Anne A-R. Du 10 mai au 3 juillet 2016, à l'Institut du Monde Arabe.