Bouchra Addou Essebbah : « Mon père m’a donné sa confiance, je ne pouvais pas le décevoir »

 Bouchra Addou Essebbah : « Mon père m’a donné sa confiance, je ne pouvais pas le décevoir »

Crédit photo : Archives personnelles Bouchra Addou Essebbah


Née en Saône-et-Loire, Bouchra Addou Essebbah a dû se battre pour bousculer les lignes et devenir avocat. A l’aise avec sa double culture, elle garde un pied dans le Royaume. 


Vous êtes issue de la seconde génération, née en France. Quel a été votre parcours scolaire ?


J’ai grandi à Montceau-les-Mines, où mon père était ouvrier. Un travailleur aussi courageux qu’exemplaire. Mes parents, et particulièrement ma mère, m’ont inculqué la valeur du travail et le goût de l’effort. Après un bac S, je me suis dirigée vers des études de droit à Dijon. Cependant, il fallut convaincre mon père qu’une fille d’origine marocaine pouvait étudier loin de ses parents. Ce fut mon premier combat, ma première plaidoirie et ma première victoire !


 


Après l’obtention de votre maîtrise de droit, vous rejoignez Lyon pour exercer comme juriste. Cela n’a pas dû être simple pour vos parents ?


Ce n’était pas évident pour mon père de laisser la seule fille d’une fratrie de quatre, en âge de se marier, partir à Lyon. Mais il a cédé une nouvelle fois. Il m’a donné sa confiance et je ne pouvais pas le décevoir. A Lyon, durant deux ans, j’ai été juriste d’un cabinet de généalogie chargé de retrouver les héritiers des successions vacantes. En rencontrant greffiers, avocats… j’ai alors pris conscience que je n’avais pas achevé ce que je voulais faire : je suis donc retournée sur les bancs de la fac pour obtenir un master 2 en droit processuel et je me suis inscrite à l’Institut d’étude judiciaire de Dijon pour préparer l’examen d’entrée à la profession des avocats. J’ai eu mon concours et je suis restée à Dijon, au plus près de ma famille et mes amis.


 


Vous avez décidé d’ouvrir votre cabinet, un choix qui présentait certains risques…


Tout n’a pas été simple mais j’ai eu la chance d’être entourée. J’ai créé mon cabinet il y a cinq ans et ne regrette pas ce nouveau défi lancé qui me laisse plus de latitude pour l’organisation de mon travail, ma vie de famille et le choix de mes dossiers. J’interviens essentiellement en droit pénal, droit de la famille et des personnes, droit social. J’ai également dû élargir mon intervention au contentieux du droit des étrangers du fait de mes origines marocaines qui intéressent certains clients. Ces derniers s’orientent vers moi pour les assister dans les problématiques relatives au titre de séjour.


 


Quel rapport entretenez-vous avec le Maroc, votre pays d’origine ?


J’y suis très attachée. J’ai beaucoup de famille là-bas. Pour faire très simple, je dirai que la France représente ma mère et le Maroc mon père. Mes parents nous y amenaient chaque été, nous attendions impatiemment ce cadeau de fin d’année. Je continue à faire ce voyage avec mon mari et mes enfants pour garder le lien et ce d’autant plus qu’une grande partie de ma famille y réside. J’y retourne très souvent puisque je participe à la dynamique et aux échanges initiés par le ministère chargé des Marocains résidant à l’étranger pour créer une association des avocats MRE, destinée à créer un réseau d’entraide internationale en faveur de la diaspora marocaine. 

Jonathan Ardines