M’hammed Aguennouz : « Faciliter la venue des étudiants marocains en Italie »

 M’hammed Aguennouz : « Faciliter la venue des étudiants marocains en Italie »

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Professeur en clinique de neurosciences au département de médecine expérimentale, il dirige le laboratoire de génomique à l’université de Messine, en Sicile. Très attaché à son pays d’origine, M’hammed Aguennouz a participé à l’installation de la médecine physique au Maroc. 


Quel a été votre parcours avant d’émigrer en Italie pour y poursuivre vos études ?


Originaire de Khénifra, j’ai grandi à Beni Mellal, là où mon père travaillait en tant que militaire. J’ai ensuite fait mon parcours scolaire à Marrakech, où j’ai décroché ma licence avant de me diriger vers l’Italie pour parfaire mes études. Je ne connaissais ni la langue ni le pays, mais j’avais des amis là-bas dont un qui étudiait l’agronomie à Bari, ce qui m’a incité à les rejoindre.


 


Le changement, la barrière de la langue… les débuts ont dû être compliqués ?


Oui, vraiment. Je ne parlais pas un mot d’italien. Et puis j’ai connu des difficultés interminables pour obtenir la validation de mes diplômes. En 1988, le Maroc ne possédait pas d’accords bilatéraux sur les études supérieures. En attendant que mon dossier avance entre les ministères, j’ai pris des cours de langue à l’université de Pérouse. Un an plus tard, mes diplômes ont été homologués et j’ai pu débuter mon troisième cycle à l’université de Messine pour obtenir un diplôme en médecine expérimentale. J’ai eu la chance de pouvoir participer à un appel à projets et j’ai bénéficié d’une bourse d’études. J’ai intégré alors un projet de recherches sur les maladies neuro-dégénératives à Milan, puis j’ai enchaîné sur une spécialité en génétique médicale.


 


Vous êtes désormais basé au CHU de Messine, pourquoi ce choix ?


J’ai passé de longues années à l’hôpital de Messine où j’ai gravi les échelons, puis j’ai obtenu l’habilitation pour le titre de professeur en clinique de neurosciences au département de médecine expérimentale. J’y donne des cours et je dirige le laboratoire où nous prenons en charge les maladies neuromusculaires. Il est ouvert aux citoyens pour y passer des examens.


 


Quel rapport entretenez-vous avec le Maroc et quelle est votre implication pour le développement de votre pays natal ?


Avec le Maroc j’ai fait tant de choses et j’espère en faire beaucoup d’autres à l’avenir. Entre 2010 et 2014, j’ai eu la chance d’être appelé par le président de l’université de Rabat pour une collaboration. J’ai ainsi participé au projet européen pour installer la médecine physique à Rabat. Un programme financé grâce à deux partenaires, l’Italie et la France. A l’université Mohammed-V, en quatre ans, nous avons formé vingt médecins et autant de techniciens en kinésithérapie. Grâce à ce programme, la médecine physique a été reconnue comme une spécialité par le gouvernement.


 


Vous avez à cœur de développer les ponts entre le Maroc et l'Italie en incitant les étudiants à vous rejoindre…


Absolument. J’ai offert six bourses aux étudiants marocains, signé des conventions avec Rabat et Marrakech pour des projets en commun et j’aimerais que le Royaume facilite la venue des étudiants en Italie. Cela pourrait aider à changer l’image que l’on se fait de l’immigration. De plus, il y a aussi des postes réservés aux extracommunautaires et on peut faciliter l’obtention de bourses. Il me semble qu’il y a là un véritable potentiel à cultiver.


MAGAZINE MARS 2018

Jonathan Ardines