Algérie. Tebboune limoge son Premier ministre, un intérim inédit au sommet de l’État

Abdelmadjid Tebboune
Un coup de théâtre politique secoue l’Algérie. La présidence a annoncé, aujourd’hui jeudi 28 août 2025, la fin par décret des fonctions du Premier ministre Nadir Larbaoui, remplacé par intérim par le ministre de l’Industrie, Sifi Ghrieb.
Cette décision soudaine de Tebboune, prise sans explication officielle, nourrit diverses interrogations et spéculations dans un climat déjà marqué par une certaine opacité autour du fonctionnement du pouvoir algérien.
Larbaoui, en poste depuis novembre 2023, n’aura donc exercé ses responsabilités qu’à peine neuf mois. La présidence n’a fourni aucune justification à ce limogeage ni à la nomination, fait inédit, d’un Premier ministre intérimaire. Une telle configuration ne s’était en effet jamais produite dans l’histoire institutionnelle du pays, où la tradition voulait que le chef de l’État désigne directement un successeur permanent.
La dernière apparition publique de Nadir Larbaoui remonte au 19 août, lorsqu’il s’était rendu au chevet des blessés de l’accident dramatique d’un bus tombé dans un oued près d’Alger, qui avait fait 18 morts et 24 blessés. Depuis, son absence lors d’événements officiels avait commencé à susciter des interrogations. Mardi encore, il manquait à une réunion consacrée au secteur du transport, présidée par Abdelmadjid Tebboune, à l’issue de laquelle des mesures avaient été annoncées pour renforcer la sécurité routière.
Silence du Palais
Mais au-delà de la disparition du Premier ministre de la scène publique, c’est celle du chef de l’État lui-même qui intrigue. Abdelmadjid Tebboune n’est pas apparu en public depuis près de vingt jours, une absence qui a attiré l’attention jusque dans l’opposition tunisienne. Ce silence inhabituel du président alimente plusieurs rumeurs, certains évoquant des problèmes de santé, d’autres des tensions internes au sommet de l’État, voire avec l’Etat major de l’armée. Ainsi l’absence simultanée des deux plus hauts responsables de l’exécutif n’a fait qu’épaissir le climat de suspicion.
Dans ce contexte, la désignation de Sifi Ghrieb comme Premier ministre par intérim interroge. Relativement méconnu du grand public, ce dernier occupait jusque-là le portefeuille de l’Industrie. Son rôle intérimaire traduit-il un simple choix technique, en attendant une décision plus durable ? Ou s’agit-il d’un signal politique indiquant des ajustements plus profonds à venir au sein du gouvernement ?
Pour de nombreux observateurs, ce brusque remaniement est révélateur de la fragilité de l’appareil exécutif algérien à l’approche de nouvelles échéances électorales. La transparence limitée des institutions et le manque de communication officielle laissent le champ libre aux interprétations, accentuant l’incertitude politique dans un pays confronté à des défis économiques et sociaux majeurs : malgré une croissance estimée à 4,5 % pour le premier trimestre 2025, portée par la demande intérieure et les investissements, le secteur des hydrocarbures est notamment en baisse.
En attendant d’éventuels éclaircissements, l’Algérie se retrouve dans une situation institutionnelle trouble : un président Tebboune absent de la scène publique, un Premier ministre limogé sans explication et un intérimaire dont le mandat reste flou. De quoi entretenir un climat délétère.
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