Tunisie. Feu vert parlementaire à l’ouverture de comptes en devises pour les résidents

Le Parlement tunisien a adopté, mardi 2 décembre 2025, un article additionnel dans la loi de finances 2026 autorisant enfin les Tunisiens résidant dans le pays à ouvrir des comptes bancaires en devises.
Le texte, approuvé par 69 voix, contre 17 abstentions et 17 oppositions, marque une évolution notable dans la réglementation financière tunisienne longtemps marquée par la prudence en matière de circulation de devises.
Pour le député Yassine Mami, l’un des porteurs du texte, cette avancée répond à une réalité économique que les institutions peinaient jusqu’ici à rattraper. Il a souligné dans une déclaration que l’autorisation de « l’ouverture de comptes en devises pour les Tunisiens résidant en Tunisie constitue une étape importante pour encourager les jeunes ambitieux souhaitant travailler dans un cadre légal, en particulier ceux opérant dans les secteurs numériques ».
Soulagement pour les professionnels avec clients à l’étranger
Depuis plusieurs années, une part croissante de jeunes Tunisiens tire ses revenus de plateformes internationales comme PayPal, Upwork, etc. ou encore des services de développement et de design destinés à des clients étrangers pour des freelancers et prestataires de services notamment. Or, les restrictions en matière de réception de devises, les blocages récurrents liés au paiement en ligne et l’absence de solutions bancaires adaptées créaient un goulet d’étranglement. Beaucoup étaient contraints de contourner la législation ou de recourir à des intermédiaires à l’étranger pour récupérer leurs revenus.
« De nombreux jeunes peinent à transférer leurs gains depuis l’étranger en raison des barrières légales », rappelle Mami. « Cette situation les empêche d’investir librement leurs ressources. » L’ouverture de comptes en devises permettra ainsi de recevoir directement des paiements en euros, dollars ou autres devises, avant de choisir, le cas échéant, de les convertir en dinars.
Au-delà de la facilitation administrative, le député estime que la mesure renforcera l’autonomie financière des jeunes et favorisera la structuration des activités de travail indépendant, dans un pays où l’économie numérique constitue l’un des rares secteurs en croissance. La mesure est également perçue comme un moyen de canaliser vers le système bancaire formel des flux jusque-là informels ou détournés.
Selon des sources parlementaires, ce changement législatif s’inscrit dans un ensemble plus large de batterie de réformes financières visant à moderniser la réglementation des paiements internationaux, dans un contexte où la Tunisie cherche à attirer des capitaux, à réduire la pression sur le marché parallèle des devises et à accompagner la montée en puissance des compétences technologiques locales.
Reste à définir les modalités d’application par la Banque centrale, réputée prudente et très protectionniste en matière de libéralisation du change. Les banques, elles, devront adapter leurs produits pour encadrer ce nouveau type de comptes, tout en rassurant sur la conformité et la transparence des flux entrants.
Pour Yassine Mami, il s’agit surtout d’un signal adressé à une génération connectée et largement tournée vers l’international. Ce nouvel outil financier, affirme-t-il, permettra aux jeunes Tunisiens de « participer pleinement à l’économie numérique mondiale » et de développer leurs projets « sans les obstacles qui freinaient jusque-là leur élan ».
