Arrestation d’Ayachi Hammami : nouvelle secousse politique en Tunisie

L’arrestation, mardi en fin d’après-midi, de l’avocat et militant des droits humains Ayachi Hammami a provoqué une onde de choc dans le paysage politique tunisien. L’ancien ministre chargé des Relations avec les instances constitutionnelles, connu pour ses prises de position tranchées contre le pouvoir exécutif depuis le 25 juillet 2021, a été interpellé à Tunis par des agents de la police judiciaire, en vue d’exécuter une peine en appel de 5 années de prison.
Selon les premières informations recueillies auprès de son comité de défense, Hammami a bien été arrêté dans le cadre du procès pour « atteinte à la sûreté de l’État », une qualification pénale de plus en plus utilisées contre des opposants. Les avocats dénoncent une procédure « opaque », faisant état d’un mandat d’amener émis sans notification préalable et d’un procès expéditif où il avait comparu en état de liberté, mais refusé de répondre au juge par solidarité avec les détenus qui comparaissaient à distance via visioconférence depuis leurs prisons respectives.
Cette arrestation intervient 72 heures après celle, spectaculaire en pleine rue, de l’opposante Chaima Issa, condamnée à 20 ans de réclusion dans le même procès, interpelée samedi en marge de sa participation à une manifestation à Tunis. Dans une vidéo enregistrée avant son interpellation, Hammami a annoncé qu’il entrerait en grève de la faim dès son entrée en prison.
Un futur détenu encombrant
Figure charismatique jouissant d’une large sympathie au sein de la gauche et des milieux associatifs, Ayachi Hammami avait multiplié ces derniers mois les déclarations critiques contre la politique sécuritaire du gouvernement et les procès visant des figures de la société civile. Il assurait également la défense de plusieurs détenus dans des affaires considérées par les ONG comme politiques. Pour ses soutiens, son arrestation s’inscrit dans une stratégie de « mise au silence » visant à décourager les voix dissidentes à l’approche des échéances sociales et économiques sensibles.
Du côté officiel, aucune communication complète n’a été publiée, mais une source gouvernementale affirme que l’affaire relève « du strict domaine judiciaire ». Une justification qui n’apaise guère les inquiétudes : la Ligue tunisienne des droits de l’Homme, le Syndicat national des journalistes et plusieurs partis d’opposition ont immédiatement exigé sa remise en liberté, évoquant une « pente dangereuse » dans l’usage de la justice pénale.
Sur les réseaux sociaux, la mobilisation a été rapide. Le hashtag #FreeAyachiHammami circulait déjà massivement dans la soirée, alimenté par des personnalités du monde juridique et académique qui rappellent que l’avocat avait joué un rôle central dans la défense des libertés publiques durant les dernières années. Cette arrestation met une nouvelle fois sous tension les relations entre les institutions et la société civile.
