CAN 2025. Sami Trabelsi : « Le staff et les supporters sont conscients que le potentiel de la Tunisie est là »

« À la CAN au Maroc, notre ambition est claire : atteindre le dernier carré », Sami Trabelsi, coach des Aigles de Carthage.(Photo : FETHI BELAID / AFP)
Après un premier passage de deux ans, marqué par une victoire au Championnat d’Afrique des nations en 2011, le sélectionneur des Aigles de Carthage, 57 ans, est de retour en poste depuis février. À l’aube de la CAN, l’ex-international se montre lucide sur les moyens à sa disposition, mais déterminé. Interview.
LCDL : Quels sont vos objectifs pour cette compétition ?
Sami Trabelsi : Notre ambition est claire : atteindre le dernier carré, au minimum. La Tunisie a toujours été compétitive durant l’ère moderne, mais il nous a manqué cette constance dans les moments décisifs.
Aujourd’hui, nous avons une génération plus homogène, équilibrée entre joueurs d’expérience et jeunes prometteurs. L’objectif à plus long terme est de construire une équipe capable de rivaliser avec les grandes nations africaines sur le plan technique, physique et mental.
Nous devons retrouver cette grinta qui a toujours fait notre force, cette agressivité positive, ce mental de gagneur qui a caractérisé les meilleures versions de nos équipes.
Le tirage au sort de cette CAN n’a pas forcément épargné les Aigles de Carthage, qui devront affronter dès leur deuxième match les redoutables Super Eagles du Nigeria…
On sait que dans une compétition comme la CAN, il n’y a plus de tirage facile. Affronter le Nigeria, c’est forcément un défi, mais aussi une belle opportunité de mesurer notre niveau dès le début.
Les Super Eagles ont une puissance offensive exceptionnelle, mais nous avons nos arguments. Je préfère avoir l’avantage du terrain, en les affrontant dans un stade maghrébin où le public peut transcender les joueurs.
Nous avons à notre actif six victoires, sept défaites et huit nuls. Le niveau est donc bien plus proche entre les deux sélections que certains commentateurs ne le laissent penser. L’important, c’est d’aborder ce match sans complexe, avec notre identité de jeu, notre technicité reconnue et notre rigueur collective.
J’affectionne ce genre de confrontation dès la phase de groupes : cela met les joueurs dans le bain tout de suite. Car si on veut aller loin, il faut être en mesure de battre des grandes équipes. Ce sera un test de caractère, et je sais que mes joueurs aiment ce genre de rendez-vous.
Quels critères ont guidé vos choix pour la liste élargie des joueurs convoqués ?
La première considération, c’est la régularité en club. Un joueur qui ne joue pas chaque semaine, peu importe son talent, part avec un handicap s’il a peu de compétition dans les jambes.
Ensuite, je regarde la polyvalence et la discipline tactique. Le football moderne exige des joueurs capables de s’adapter rapidement à différents systèmes.
Enfin, je m’attache à l’état d’esprit : représenter la Tunisie, c’est une responsabilité. Je préfère un joueur à 100 % engagé qu’une star absente mentalement.
Justement, certains joueurs évoluant en Europe ont été retenus, d’autres non. Pouvez-vous nous expliquer vos choix ?
C’est toujours un équilibre délicat. Prenons l’exemple de Hannibal Mejbri, qui retrouve du temps de jeu à Burnley en Angleterre : son énergie et sa créativité nous sont indispensables au milieu. À l’inverse, certains talents manquent de régularité dans leurs clubs et doivent d’abord retrouver du rythme.
J’ai aussi suivi Elias Achouri à Copenhague, ou encore Amor Layouni en Suède : des profils européens mais déjà imprégnés d’une vraie culture de la sélection nationale.
Je veux des joueurs qui acceptent la logique du mérite et comprennent qu’une place en sélection n’est jamais acquise.
Vous avez intégré un nombre conséquent de jeunes talents du championnat tunisien. Quels profils vous ont particulièrement séduit ?
Le championnat tunisien regorge de jeunes aussi intéressants que sous-estimés. Je pense à Firas Chaouat (Club Africain), qui a montré une belle maturité au poste d’avant-centre, ou encore à Yassine Meriah (Espérance de Tunis), un pilier incontournable en défense.
D’autres éléments encore plus jeunes apportent une fraîcheur indispensable. Je regarde aussi de près la sélection des U17. Je le dis souvent : 18-19 ans n’est plus considéré comme « trop jeune » dans le football actuel.
Mon message est clair : la porte de la sélection est ouverte à tous, à condition de prouver qu’on la mérite sur le terrain. On ne regarde pas la carte d’identité, mais le rendement. Oui, c’est une méritocratie assumée !
Quel message souhaitez-vous enfin adresser aux supporters tunisiens à la veille de cette CAN ?
Je leur demande avant tout de croire en cette équipe. Le football tunisien traverse parfois des périodes de doute, mais nous avons des ressources. Les joueurs sont conscients de l’attente populaire. Nous irons au Maroc pour défendre nos couleurs avec honneur, discipline et ambition.
Le public tunisien mérite de vibrer à nouveau et notre mission est de lui rendre cette fierté. Notre classement FIFA actuel à la 41e place mondiale est certes perfectible, mais le staff et les supporters savent que le potentiel est là.
La régularité, la transition générationnelle et les performances dans les grands rendez-vous comme la CAN feront la différence. C’est une compétition que nous connaissons bien et où nous serons, dans un pays frère, un peu comme à la maison.
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