Benzine/Saidi : Le Coran pour les Nuls

 Benzine/Saidi : Le Coran pour les Nuls


MAGAZINE DECEMBRE 2017


Nombreux sont ceux qui citent le Coran, à bon ou mauvais escient. Bien moins nombreux sont ceux à l’avoir lu entièrement. Et encore moins à en saisir le sens et la portée. L’islamologue Rachid Benzine et le dramaturge Ismaël Saidi apportent leur drôle d’éclairage. 


Finalement, il y a quoi dans le Coran ? Périlleux exercice que de répondre à cette question faussement ­exhaustive. Car le ton est donné dès le titre : il s’agit pour les deux auteurs, Rachid Benzine et Ismaël Saidi, de répondre – sous couvert d’une discussion légère et empreinte d’humour – aux questions, non pas toutes, mais les plus récurrentes que soulève le livre sacré.


Et, dans le jeu du savant et du candide, le duo fonctionne à merveille. Le premier, Rachid Benzine, islamologue, politologue et enseignant, chercheur associé au Fonds Ricœur (Paris XIVe), enseignant à la faculté ­protestante de théologie de Paris et à L’IEP d’Aix-en-Provence (Bouches-du-Rhône), est souvent présenté comme un “archéologue de l’Islam”. Il est surtout l’auteur de nombreux ouvrages références sur le sujet. Quant à Ismaël Saidi, il est réalisateur, scénariste, auteur et dramaturge belge, et s’est notamment fait connaître pour sa pièce de théâtre à succès Djihad, fable tragicomique qui raconte la radicalisation de jeunes hommes dangereux car désorientés.


Dans cet ouvrage, au fil d’une discussion faussement débridée, le chercheur et le dramaturge abordent une à une ces questions qui dérangent, qui intriguent ou qui ravivent les animosités de tous bords. Une approche à la fois historique, anthropologique et sociologique, ­didactique aussi, tout en basculant parfois vers ­l’humour. Un choix judicieux pour disserter à bras-le-corps sur neuf thèmes parmi lesquels : le Prophète, les femmes, le voile, le djihad, la violence ou encore le rapport aux autres religions ou à l’athéisme.


 


Les textes deviennent ce que l’époque en fait


“Les grands textes sacrés sont des voyageurs. Ils traversent les siècles, les millénaires. Ils deviennent alors ce que les hommes de chaque époque en font”, explique Rachid Benzine à Ismaël Saidi dans l’un des chapitres du livre. “Nous souffrons d’un déficit d’histoire et d’un excès de mémoire, explique plus loin le chercheur au jeune dramaturge. Tout le défi de nos jours consiste à réussir à mettre entre ­parenthèses des catégories héritées de la jurisprudence islamique tardive des VIIIe et IXe siècles.” Ou de l’importance de remettre les mots en contexte. De questionner les écrits et de se documenter pour ne pas verser dans l’interprétation, ou, pire, la dérive du sens initial. Un petit essai à grande portée, à mettre entre toutes les mains.

Kader Bengriba