L’appel du Sultan Mohammed Ben Youssef aux Marocains pour soutenir les Alliés

Le Sultan Mohammed Ben Youssef en visite à l’hôpital musulman de Bobigny, le 21 juin 1945, où de nombreux combattants musulmans de la Seconde Guerre mondiale, soldats marocains ayant soutenu les Alliés, ont été décorés pour leur bravoure. (Photo: AFP)
L’engagement du Maroc durant la Seconde Guerre mondiale et son rôle dans la libération ont été au centre d’un colloque organisé mardi 6 mai à la Bibliothèque nationale du Royaume du Maroc (BNRM), un événement tenu conformément aux hautes instructions de Sa Majesté le roi Mohammed VI, chef suprême et chef d’état-major général des Forces armées royales (FAR).
Organisé par la Direction de l’histoire militaire (DHM), relevant des FAR, à l’occasion du 80ᵉ anniversaire de la fin de la Seconde Guerre mondiale (1945-2025), ce colloque visait à mettre en lumière le sacrifice de milliers de soldats marocains ayant combattu aux côtés des Alliés entre 1940 et 1945.
Cette rencontre, à laquelle ont pris part des historiens, des chercheurs, ainsi que de hauts responsables militaires marocains et étrangers, a permis de raviver la mémoire d’un chapitre crucial de l’histoire marocaine et mondiale.
Elle a également donné lieu à des échanges sur différents aspects de la participation marocaine à la guerre, notamment en matière de mobilisation, d’organisation des unités et de batailles auxquelles les troupes marocaines ont pris part, avec pour objectif de transmettre cette mémoire aux jeunes générations.
L’accent a également été mis sur le rôle stratégique du Maroc en tant que base militaire, fournisseur de troupes et lieu de préparation des opérations alliées, notamment lors du débarquement en Afrique du Nord (opération Torch, 1942).
Prenant la parole à cette occasion, la directrice des Archives royales, Bahija Simou, est revenue sur l’appel lancé le 3 septembre 1939 par le sultan Sidi Mohammed ben Youssef aux Marocains, les appelant à soutenir la France et ses alliés.
« Cet appel, ancré dans une légitimation religieuse et nationale, marque un tournant politique fort », a-t-elle souligné, notant qu’il a traduit la volonté du Maroc de s’engager pleinement dans l’effort de guerre mondial, tant sur le plan militaire qu’économique et symbolique.

40 000 Marocains tombés au champ d’honneur pour la France
Pour sa part, l’ambassadeur de France au Maroc, Christophe Lecourtier, a souligné que cette rencontre était l’occasion de rappeler avec force le rôle majeur joué par le royaume du Maroc et ses soldats aux côtés de la France, notamment lors des campagnes de Tunisie, d’Italie et dans la libération du territoire français.
« Je tiens à exprimer mon profond respect à tous ces combattants, venus de loin pour défendre la liberté sur notre sol », a-t-il déclaré. « La France n’oubliera jamais les 40 000 Marocains tombés pour sa liberté, ni les 90 000 qui se sont engagés », a-t-il affirmé, ajoutant que cette fraternité d’armes constitue un socle solide de notre amitié.
De son côté, l’historien français Pierre Vermeren, professeur d’histoire contemporaine à l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, a retracé les grandes étapes de l’engagement des soldats marocains aux côtés de la France.
« Leur engagement forge une alliance durable, concrétisée notamment par la construction de la mosquée de Paris en 1926. Cette collaboration, poursuivie jusqu’en 1939, préfigure une relation plus équilibrée entre les deux nations », a-t-il précisé.
Le directeur de l’Institut royal pour la recherche sur l’histoire du Maroc, Rahal Boubrik, a rappelé que, dès septembre 1939, le Maroc s’est mobilisé pour soutenir la France face à l’Allemagne nazie.
Il a ajouté que le royaume avait également contribué à l’effort de guerre par ses ressources et ses infrastructures. Cet engagement, souvent méconnu, a renforcé les liens entre la France et le Maroc et témoigne, selon lui, d’une « solidarité historique exceptionnelle ».