Présidence du gouvernement, un naufrage communicationnel

 Présidence du gouvernement, un naufrage communicationnel


Au moment où le seuil des attentes des Tunisiens est à son plus haut vis-à-vis de sa classe dirigeante, le nouveau chef du gouvernement désigné Habib Jemli est apparu le 3 novembre dans un format particulièrement terne, lors d’une allocution censée rassurer l’opinion publique sur le bon déroulement des négociations en vue de former son équipe gouvernementale.



 


Un cas d’école, florilège des erreurs élémentaires à ne pas commettre en matière de communication institutionnelle. C’est en ces termes que l’on pourrait résumer la malheureuse prestation du chef du gouvernement désigné, préoccupante de par l’impression d’amateurisme qui l’entoure.


Première incongruité flagrante, l’absence de tout drapeau national, d’autant qu’il s’agit en l’occurrence d’une adresse solennelle au peuple. Un manquement plus grave encore si l’enregistrement a lieu au Palais de Dar Dhiafa à Carthage, où Habib Jemli table sur la composition de son gouvernement depuis la mi-novembre.


Toujours du point de vue de la forme, les internautes n’ont pas manqué de relever à juste titre le sinistre décor servant de background à l’allocution : un simple mur terne, et surtout un radiateur affublé d’un cache-radiateur occupant les deux tiers du cadre de l’image…  


 


Inacceptable


Plus problématique, posture empruntée et introvertie, le chef du gouvernement désigné est de surcroît quasiment inaudible. A ce niveau de responsabilité, cela est tout simplement inacceptable. Qu’en 2019, à l'heure où les Tunisiens sont rompus à des talents et des standards internationaux en la matière, ne pas être en mesure de recruter une agence de com’ munie d’un simple micro fonctionnel, cela relève sinon d’une incompétence collective, du moins d’individus ayant raté le train de la révolution numérique.


Pire, les personnes en charge de la communication digitale du nouveau chef de l’exécutif, si elles existent, ont visiblement cru bien faire en signant toutes leurs œuvres par un « Habib Jemli Officiel », une façon de se distinguer des copies, courante dans la gestion des comptes des starlettes du show-business, mais qui n’a pas sa place en communication institutionnelle où il convient par exemple de demander un badge de certification sur les réseaux sociaux à Google et Facebook.     


La performance intervient pourtant plusieurs jours après que de nombreuses voix se soient levées partout sur la toile pour s’alarmer également du manque de prestance vestimentaire du chef du gouvernement, un aspect certes plus subjectif. Un point auquel Jemli a tenté de répondre en organisant un shooting photo professionnel, sans vraiment convaincre, s’attirant encore plus de critiques.  


En attendant l’annonce de la nouvelle configuration gouvernementale qui s’éternise, l’homme pensait ainsi répondre aux agences presse qui se plaignaient du manque de photos d’illustration de cet inconnu de la scène politique, parachuté par Ennahdha à la Kasbah, pour qui le costume de personnage le plus important de l’Etat semble décidément beaucoup trop grand.  


 


>> Lire aussi : Tunisie. La technocratie, maladie chronique de la démocratie

Seif Soudani