Bill Bazzi, officiellement nouveau visage de la diplomatie américaine à Tunis

 Bill Bazzi, officiellement nouveau visage de la diplomatie américaine à Tunis

Le Sénat américain a approuvé hier soir mardi 7 octobre 2025 la nomination de Bill Bazzi comme nouvel ambassadeur des États-Unis en Tunisie. Ce choix, voulu par le président Donald Trump, intervient à un moment de réévaluation stratégique des priorités américaines en Afrique du Nord et plus généralement au Moyen-Orient.

 

Originaire du Michigan et fils d’immigrés libanais, Bill Bazzi s’est imposé comme une figure montante de la vie publique américaine. Ancien militaire de l’US Navy et ingénieur en aéronautique, il a ensuite entamé une carrière politique locale, jusqu’à devenir maire de Dearborn Heights, ville emblématique de la communauté arabo-américaine. Connu pour son pragmatisme et sa capacité à dialoguer entre cultures, Bazzi représente une nouvelle génération de responsables américains conscients de la diversité du pays et de l’importance du lien avec les diasporas.

Sa désignation à Tunis dépasse le simple cadre diplomatique : elle traduit une volonté de reconnecter avec un partenaire longtemps jugé stratégique, mais dont la trajectoire politique récente a suscité des interrogations à Washington. Depuis la concentration des pouvoirs par le président Kaïs Saïed en 2021, les relations entre Tunis et les États-Unis ont connu une phase de prudence, marquée sous l’ancienne administration démocrate par la suspension partielle de certaines aides et par des prises de position américaines en faveur du respect des libertés et de l’État de droit, et ce après un soutien massif au pays après la révolution de 2011.

 

Derrière les tensions apparentes, la réalité des liens solides

Pour autant, la Tunisie demeure un maillon clé de la politique américaine dans la région, en raison de sa position géographique, de son rôle dans la stabilité méditerranéenne et de sa coopération sécuritaire. Les États-Unis y soutiennent des programmes de formation militaire, de développement économique et de transition énergétique. En 2024, l’administration américaine avait d’ailleurs renouvelé son appui à plusieurs projets dans les régions défavorisées du centre et du sud, symboles de la lutte contre les inégalités.

Le mandat de Bill Bazzi s’annonce donc complexe. Il devra réconcilier les principes et les intérêts, en maintenant un dialogue franc sur la gouvernance tout en consolidant la coopération économique et sécuritaire, tel que le laissait déjà entendre son exposé pré nomination devant le sénat. L’enjeu sera aussi de préserver la place de la Tunisie dans la politique américaine de voisinage élargi, alors que la concurrence géopolitique s’intensifie dans la région, avec la présence croissante de la Chine et de la Russie et le discours souverainiste de plus en plus décomplexé du président Saïed.

Le profil de Bazzi pourrait constituer un atout s’agissant de cette équation délicate : son ancrage communautaire, son expérience de terrain et sa compréhension fine des identités multiples lui offrent une capacité rare à incarner la diplomatie américaine autrement. Plus qu’un simple relais de Washington, il pourrait devenir un médiateur culturel et politique, à même de renouer un dialogue de confiance avec la société tunisienne, souvent méfiante vis-à-vis des intentions occidentales.

L’arrivée de Bill Bazzi à Tunis marque ainsi un tournant symbolique : celui d’une diplomatie américaine cherchant à combiner réalisme stratégique et reconnaissance des diversités culturelles. Dans une région en recomposition, le nouvel ambassadeur aura la tâche de redonner sens et contenu à une relation bilatérale que ni la Tunisie ni les États-Unis n’ont intérêt à voir s’étioler.

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