Coronavirus : l’UE annonce une aide de plusieurs milliards d’euros pour l’Afrique

 Coronavirus : l’UE annonce une aide de plusieurs milliards d’euros pour l’Afrique


La Présidente de la Commission européenne, Ursula Von der Leyen, a annoncé ce mardi le déblocage d’une enveloppe de 15,6 milliards d’euros pour les pays hors Europe, principalement en Afrique. Cette somme servira à renforcer les systèmes de santé africains face à l’épidémie et à soutenir les économies déjà plongées dans la crise.


Après des semaines de flou, la réaction européenne à la pandémie se précise. Cette semaine, la Commission européenne a présenté aujourd’hui ses plans destinés à soutenir les efforts déployés par les pays partenaires pour faire face à la pandémie de COVID-19. « L’action collective de l’UE visera principalement à répondre à la crise sanitaire actuelle et aux besoins humanitaires qui en découlent, et à renforcer les systèmes de santé, d’approvisionnement en eau et d’assainissement des pays partenaires, ainsi que les capacités de recherche et de préparation de ces pays face à la pandémie, et à atténuer les conséquences socio-économiques de la crise », indique le communiqué de la Commission.


« Ce défi planétaire rend nécessaire une coopération internationale forte », a déclaré Mme Von der Leyen. Elle annonce en outre la tenue d’une conférence virtuelle des donateurs pour lever des fonds et soutenir l’action de l’OMS dans les pays les plus vulnérables.


« La pandémie de COVID-19 requiert une réaction unie, mondiale et coordonnée (…) nous devons également aider nos partenaires qui se trouvent dans notre voisinage direct et au-delà à faire face à l’impact que cette crise aura sur leurs moyens de subsistance, leur stabilité et leur sécurité, car leurs difficultés sont aussi les nôtres » a précisé Josep Borrell, haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et vice-président de la Commission.


L’UE promet ainsi « d’adapter sa réaction à l’évolution de la situation et de centrer son action sur les pays les plus touchés qui ont besoin d’une assistance sanitaire, notamment en Afrique, dans les pays du voisinage, dans les Balkans occidentaux, au Moyen-Orient et en Afrique du Nord » notamment. Sur l’enveloppe globale de 15,6 milliards euros, 3,25 milliards d’euros sont destinés à l’Afrique, dont 1,19 milliard d’euros pour les pays du voisinage d’Afrique du Nord. Le train de mesures comprend en outre un montant supplémentaire de 1,42 milliard d’euros de garanties en faveur de l’Afrique et des pays du voisinage provenant du Fonds européen pour le développement durable.


 


Éviter une deuxième épidémie


Depuis le début de l’épidémie mondiale, et bien qu’elle soit pour le moment moins durement touchée que les autres continents, l’Afrique suscite beaucoup d’inquiétude compte tenu de la vétusté des systèmes de santé dans la plupart de ses pays. De plus, des millions d’Africains vivent de petits boulots, et leurs moyens de subsistance sont directement menacés par les mesures de confinement en vigueur dans un nombre croissant de pays.


L’aide massive de l’Europe au continent africain pourrait susciter des interrogations, alors que le vieux continent est lui-même confronté à l’une des pires crises depuis un siècle. La France s’attend ainsi à connaître la pire récession depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, a déclaré début avril son ministre de l’Économie, Bruno le Maire.


Mais pour le chroniqueur et spécialiste des questions internationales Pierre Haski, il s’agit d’une décision de bon sens pour deux raisons principales, outre évidemment la dimension humanitaire de cette décision.


La première, et sans doute la plus importante, est que le virus n’a pas de frontière. Une fois l’Europe sortie de l’épidémie après un choc qu’elle saura surmonter, elle craint que le virus ne revienne depuis l’extérieur. D’autant plus qu’en laissant des millions d’Africains être contaminés, cela fait autant de possibilités pour le virus de muter vers une forme plus dangereuse.


Alors que l’Europe compte en moyenne 36 médecins et 51 lits d’hôpital pour 10 000 habitants, l’Afrique ne compte qu’un médecin et 10 lits. C’est pourquoi l’essentiel de cette aide servira à fournir du matériel de protection et des équipements médicaux, afin d’éviter la catastrophe sanitaire qui s’annonce.


 


Lutte d’influence entre grandes puissances


Ensuite, il ne faut pas oublier que toute crise a une dimension géopolitique. Laisser l’Afrique faire face seule, c’est risquer de voir des gouvernements imploser et des économies s’effondrer, comme l’anticipe une note du ministère français des Affaires étrangères. L’Europe craint sans doute une explosion des flux migratoires dans un tel scénario.


Par ailleurs, alors que la Chine est en phase de sortie de l’épidémie, elle redore son image écornée en envoyant de l’aide aux autres pays. Elle en profite pour vanter son modèle de gestion et avancer ses pions, notamment en Afrique, dans la continuité de sa politique d’influence sur le continent. L’aide européenne s’inscrit également dans ce contexte de lutte d’influence en Afrique, tout comme celle de ses États membres, France en tête.


L’Agence française de développement a par exemple annoncé ce mercredi le lancement l’Initiative « Covid-19 – Santé en commun » au profit de la Tunisie dotée de 1,2 milliard d’euros d’ici à l’été 2020. Une aide destinée entre autres à renforcer les moyens de surveillance épidémiologiques et à soutenir financièrement les systèmes de santé.

Rached Cherif