Dans les plis des cartes : entre réalité scientifique et récits alternatifs

 Dans les plis des cartes : entre réalité scientifique et récits alternatifs

Exposition “Dans les plis des cartes”, jusqu’au 11 janvier 2026 au Lieu Unique (LU), à Nantes. Photo : @ Fanny Trichet

La carte, un outil universel détourné, trituré, rayé, redessiné par une quinzaine d’artistes pour l’exposition Dans les plis des cartes (Nantes). Des œuvres révélant d’autres récits géopolitiques.

 

« Cartographier, c’est faire exister, donner vie ! », avançait Alexandra Müller, nouvelle directrice du Musée Jules-Verne (Nantes), en amont de l’exposition Dans les plis des cartes.

Présentée jusqu’au 11 janvier 2026 au Lieu Unique (LU), à Nantes, elle rassemble aussi bien des créations d’art contemporain que d’art brut ou encore d’art numérique, autour d’un même médium : la carte.

Pour Eli Commins, directeur du Lieu Unique et l’un des trois commissaires de l’exposition avec Alexandra Müller et Patrick Gyger, la carte a toujours été utilisée comme médium pour « écrire, fictionner, détourner ».

Le directeur du LU soulignait, par exemple, que la carte avait été un outil central de la colonisation. Enjeux géopolitiques, historiques, crises migratoires, climatiques, créations fantastiques : les œuvres présentées dans l’exposition ouvrent l’imaginaire des possibles bien au-delà des limites physiques de cet objet qu’est la carte.

Entre réel et imaginaire

La ville de Nantes possède un trésor : une carte de L’Île mystérieuse dessinée de la main de Jules Verne. Il avait ainsi créé ce territoire, l’avait rendu réel, selon Patrick Gyger, directeur général de la Plateforme 10 (Lausanne).

Ce dernier rappelait que la carte était « notre manière de figurer notre espace et notre temps, avec une vue totalement subjective, porteuse de notre vie, de notre expérience ».

Une définition qui s’applique aux œuvres de plusieurs artistes exposés, dont François Burland. L’artiste suisse a eu l’occasion de rencontrer de jeunes adultes engagés sur la route de l’exil.

À travers sa création, il a voulu les aider à faire exister leur parcours de migration. Épreuves, violences, détours forcés, espoirs, rêves évanouis : c’est à l’encre rouge sombre, rouge sang, que sont inscrits sur une large carte ces parcours tortueux.

En outre, le support est en adéquation avec le thème puisque la carte est composée de sacs alimentaires : un matériau friable, vivant, éphémère, sur lequel ces récits prendront un autre relief avec les effets du temps.

Reconstruction

« Toutes mes cartes sont de vraies cartes du monde iraniennes. Je les déconstruis en les dépolitisant. J’enlève les noms, drapeaux et frontières. Je ne laisse que les océans. C’est une reconstruction », confiait l’artiste iranienne Ghazel le jour du vernissage de l’exposition.

Arrivée en France en 1986 après avoir quitté l’Iran en guerre, elle s’est nourrie de son expérience faite d’exil, de guerre, de mort, pour créer ses propres cartes, son propre monde. Des œuvres que Ghazel veut simples, accessibles.

Les cartes sont des objets qui évoquent quelque chose pour tout le monde. « Je n’aime pas les titres qui donnent trop de directions. Mes titres sont assez génériques », précisait l’artiste.

Pour l’exposition nantaise, elle présente Dyslexia, un titre laissant une grande place à l’interprétation et à l’appropriation de chacun, selon la volonté de Ghazel.

Dyslexia de Ghazel – Crédit photo : Ghazel.me

Des possibilités imaginaires illimitées par le biais de cartes aux limites plus ou moins définies : avec Dans les plis des cartes, le Lieu Unique se mue en porte vers des mondes infinis.

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