Claire et Sofiane Ben Chaabane, la fibre méditerranéenne

 Claire et Sofiane Ben Chaabane, la fibre méditerranéenne

crédit photo : Zoé Fellah


Ce couple franco-tunisien est à l’origine de Lyoum, une griffe de prêt-à-porter née au lendemain de la révolution du jasmin, et qui entend “ériger des ponts, à l’heure où certains veulent construire des murs”. 


”Nietzsche loved shakshouka”, “Oum Kalthoum loved macarons.” C’est ce genre de messages drôles et décalés qui a permis à Lyoum de se faire connaître. La griffe “casual”, qui ambitionne non pas de moderniser le traditionnel, mais d’apporter une touche tradi aux codes modernes, est née en 2012 en Tunisie. L’année d’avant, Sofiane, qui a grandi à Tunis, et Claire, son épouse qu’il a rencontrée sur les bancs d’une école de commerce, l’ESCP, vivent à Paris. Lui travaille dans la publicité ; elle est responsable communication dans un groupe textile leader en France.


Au cours de leurs voyages, ils font le constat que la Tunisie, à l’inverse des autres pays du bassin, ne valorise pas suffisamment son identité méditerranéenne. Ils ont alors une vague idée de la façon d’y remédier. La révolution tunisienne, avec tout l’élan et l’espoir qu’elle suscite, fera office de déclencheur. “On s’est dit que c’était le moment de concrétiser ce projet qui nous tenait à cœur”, explique Sofiane Ben Chaabane.


 


“Un coup de folie calculé”


Avec leurs deux jeunes enfants, le couple s’installe donc à ­Tunis au lendemain de la révolution du jasmin. “C’était un coup de folie calculé, car on avait identifié un besoin pour ce style maghrébin et moderne. A une époque où certains veulent construire des murs, il y a aussi ceux qui veulent ériger des ponts”, poursuit ­Sofiane Ben Chaabane. Pour démarrer l’activité, les trentenaires puisent près de 60 000 euros dans leurs économies et, prudents, ils commencent par une collection enfant qu’ils vendent dans un espace où l’on peut se restaurer. Au bout de deux ans, ils créent une gamme adulte, qui n’a cessé de s’étoffer.


 


Un chiffre d’affaires au beau fixe


Les deux fondateurs définissent ensemble les thématiques des quatre collections annuelles. Claire s’occupe de la direction artistique et de la production (près de 12 000 pièces chaque année) ; Sofiane prend en charge le développement, la communication et les équipes de vente. La société compte aujourd’hui une douzaine de salariés, sans compter les emplois indirects générés ­auprès des fournisseurs, ceux-là mêmes qu’il a fallu convaincre au lancement. “Ils étaient habitués à des volumes beaucoup plus importants que ce qu’on pouvait leur demander.”


“Le plus difficile, ce n’est pas de se lancer, mais de garder une qualité constante”, poursuit Sofiane, qui peut s’enorgueillir du succès de Lyoum. “On est sur une très belle tendance. En 2016, le chiffre d’affaires annuel a doublé. En 2017, il a augmenté de 25 %, et en 2018, sa croissance devrait tourner autour de 30 %.” Et ce, sans aucune autre forme de publicité que celle du bouche-à-oreille digital.


Aujourd’hui, en plus des deux boutiques tunisoises (une troisième est prévue), Lyoum est distribuée au Caire et en Europe via son e-shop, géré depuis Paris, qui réalise 20 % du chiffre d’affaires de la marque. Plus ponctuellement, des pop-up stores (magasins éphémères, ndlr) ouvrent à Paris ou à Londres. 

Fadwa Miadi