Abdelkarim Ramdane : Une triple culture en héritage

 Abdelkarim Ramdane : Une triple culture en héritage

Abdelkarim Ramdane


MAGAZINE DECEMBRE 2017


Né à Colmar, de parents marocains, cet élu écologiste de 32 ans conjugue avec bonheur ses identités françaises, alsaciennes et marocaines. 


A l’entendre parler, impossible de ne pas deviner que ce fils de Marocains est alsacien. “Tu ne te rends pas compte que tu conjugues les deux identités car ça se fait naturellement”, explique Abdelkarim Ramdane, élu Europe-Ecologie-Les Verts (EELV) et conseiller municipal délégué à la lutte contre les discriminations dans le cadre de l’insertion sociale et professionnelle à Strasbourg. “Je ne parle pas l’alsacien, concède-t-il. Mais je connais quelques notions de formules de politesse, des gros mots. Et j’ai l’accent”, s’amuse le trentenaire.


Né à Colmar, dans le Haut-Rhin, le jeune homme a toujours fait siennes la culture et les traditions alsaciennes. “Mes parents sont arrivés du Maroc dans les années 1960. Ils ne parlaient ni le français ni l’alsacien, mais mon père s’est familiarisé à ces deux langues sur les chantiers. Quand j’étais petit, on allait chercher notre viande chez le paysan du coin, alors, forcément, nous étions connectés à cette réalité régionale !” se souvient-il.


 


“Abdelkarim, c’est pas alsacien !”


Français, alsacien et d’origine marocaine, c’est ainsi que se définit Abdelkarim Ramdane qui se dit “rodé” à cette triple culture. “Mes parents sont eux-mêmes ­issus d’une région marocaine limitrophe au Rif, lequel a son propre patois. Et, dans la famille, nous avons quelques branches éloignées d’origine berbère. Avec un tel parcours, tu intègres assez rapidement les particularismes régionaux”, renchérit-il.


A l’âge de 18 ans, il débarque à Strasbourg pour passer son bac et démarrer un BTS en alternance. Lui, à qui son père a toujours répété qu’il était “d’ici”, se retrouve confronté au soupçon de ne pas être “un vrai Alsacien”. “Je travaillais dans une entreprise d’électroménager, et un client d’une cinquantaine d’années m’a fait remarquer que j’avais l’accent alsacien. Mais il a noté aussi mon prénom inscrit sur mon badge et m’a lancé : ‘Abdelkarim, c’est pas alsacien !’”, se rappelle Abdelkarim Ramdane.


 


Surnommé “le Boche” par une partie des siens


Il se souvient aussi que, lorsqu’il était petit, une partie de sa famille en région parisienne le surnommait “le Boche”, à cause de son accent. “Quand je sors de la ­région, je me rends compte que je ne suis pas que français ou marocain. Je suis alsacien.”


Dans une région où le Concordat régit les religions catholique, protestante et juive, Abdelkarim Ramdane, qui se revendique croyant et pratiquant, salue la “vraie force du dialogue interreligieux”. “Ici, en Alsace, nous ne sommes pas crispés sur la question de la laïcité comme on peut l’être ailleurs en France”, explique le jeune élu. C’est aussi la position d’EELV sur la question du voile, à envisager “dans le respect de l’autonomie des individus”, qui le pousse à prendre sa carte au parti en 2009. “Le fait que le parti soit aussi régionaliste m’a conforté dans le fait qu’on peut être français avec une identité ­régionale”, conclut Abdelkarim Ramdane. 


 


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