Révision des accords avec l’UE : la Tunisie engage une procédure express

 Révision des accords avec l’UE : la Tunisie engage une procédure express

Convoqué par une commission parlementaire, le ministre du Commerce a affirmé que la date du 1ᵉʳ janvier 2026 a été fixée comme date butoir pour l’adoption du régime euro-méditerranéen et son entrée en vigueur effective

À la veille de la nouvelle année, la Tunisie a engagé une démarche aussi rapide que sensible : la révision de plusieurs accords qui encadrent ses relations économiques avec l’Union européenne.

En quelques jours seulement, des projets de loi modifiant des textes clés du partenariat euro-méditerranéen ont été soumis par Carthage au Parlement, dans un calendrier resserré qui contraste avec l’ampleur des enjeux concernés.

Cette initiative de la présidence de la République intervient alors que l’Union européenne demeure le premier partenaire commercial de la Tunisie, absorbant l’essentiel de ses exportations industrielles et jouant un rôle central dans de nombreux secteurs stratégiques. Toucher à ce cadre juridique, patiemment construit depuis les années 1990, revient donc à redéfinir des équilibres économiques majeurs, aux conséquences potentielles durables pour les entreprises tunisiennes.

 

Des accords techniques aux effets très tangibles

Les textes soumis, dont le projet de loi n°119/2025, portent en l’occurrence sur trois dimensions distinctes mais étroitement liées : les mécanismes techniques des échanges commerciaux entre la Tunisie et l’UE, le cadre global du partenariat de libre-échange entre Tunis et Bruxelles, ainsi que les règles déterminant l’origine des produits pouvant bénéficier d’un accès préférentiel au marché européen. Ces aspects, souvent perçus comme techniques, conditionnent pourtant concrètement la compétitivité des exportations tunisiennes et l’intégration du pays dans les chaînes de valeur euro-méditerranéennes.

Toutefois, ce qui surprend le plus les observateurs n’est pas tant la volonté de réviser ces accords que la manière dont la procédure a été enclenchée. Les délais accordés à l’examen parlementaire sont en effet particulièrement courts, laissant peu de marge pour une analyse approfondie ou pour l’audition des acteurs économiques concernés de surcroît en pleine trêve hivernale. Aucune communication officielle détaillée n’a, pour l’heure, permis de comprendre les objectifs poursuivis par cette révision, ni les concessions éventuelles ou les gains espérés pour la Tunisie via ce changement de cap souverainiste.

 

Une méthode qui suscite interrogations et critiques

Dans un contexte économique tendu, marqué par une croissance fragile, des finances publiques sous pression et une dépendance accrue aux exportations, cette absence de visibilité alimente les interrogations. Les règles commerciales ne sont ainsi pas de simples ajustements administratifs : elles influencent l’investissement, l’emploi et la capacité des entreprises à se projeter à moyen et long terme.

Au Parlement comme dans les milieux économiques, la méthode suscite donc davantage de débats que le fond lui-même. Plusieurs observateurs s’interrogent sur l’opportunité d’un traitement expéditif de dossiers aussi structurants, alors que le pays gagnerait à ouvrir un débat élargi sur sa stratégie commerciale et son positionnement vis-à-vis de l’Europe.

En révisant dans l’urgence des accords déterminants pour son économie, la Tunisie fait un choix politique fort, même si le contenu exact des amendements est encore flou pour l’heure. Reste à savoir si cette accélération controversée s’inscrit dans une vision clairement assumée ou si elle risque, au contraire, d’accentuer les zones d’ombre autour de l’avenir des relations tuniso-européennes.