Fuite des cerveaux : des milliers d’ingénieurs tunisiens quittent le pays chaque année

 Fuite des cerveaux : des milliers d’ingénieurs tunisiens quittent le pays chaque année

Oussama Kheriji


Près de trois mille ingénieurs quittent la Tunisie chaque année dans l’espoir de décrocher un travail à l’étranger et une rémunération comprise entre 2500 et 3000 euros par mois en début de carrière. Une tendance qui s’accroit en l’absence de conditions favorables sur le marché du travail tunisien. C’est ce qu’a révélé ce weekend le doyen de l’Ordre des ingénieurs tunisiens (OIT) Oussama Kheriji dans une déclaration aux allures de sonnette d’alarme.



La 12ème élection du Conseil des grands électeurs de l’OIT a permis ce weekend d’élire 10 nouveaux membres et un nouveau doyen


 


Kheriji, qui s’exprimait en marge d’une séance plénière élective de l’OIT, a ainsi rappelé que la plupart des ingénieurs tunisiens fraîchement diplômés ne peuvent toujours aspirer qu’à des salaires mensuels variant entre 1000 et 1200 dinars tunisiens. Une somme qu’il considère dérisoire, qui progresse trop lentement au regard de l’inflation galopante, mais qui correspond à la moyenne salariale du pays.


 


L’ingénierie informatique, particulièrement touchée


« La migration des ingénieurs tunisiens, en particulier ceux spécialisés dans le développement informatique, s’est accrue de façon exponentielle et ne saurait être considérée désormais comme simple phénomène conjoncturel », regrette la même source.


Le pays compte-t-il trop de diplômés du supérieur ingénieurs ? Kheriji a fait remarquer à cet égard que le secteur de l’ingénierie dans son ensemble est confronté à « plusieurs défis majeurs », dont la précarité de l’emploi et des salaires, ainsi que le taux encore « trop faible » d’ingénieurs dans les entreprises publiques et privées qui n’a pas dépassé 1,2% cette année, sachant que le nombre d’ingénieurs inscrits à l’OIT a atteint 70 mille ingénieurs…


Le doyen de l’OIT a par ailleurs mis l’accent sur la nécessité d’« identifier et d’inventer des mécanismes innovants afin d’inciter les ingénieurs à rester en Tunisie ». Il a en outre exprimé l’espoir de voir les requêtes des ingénieurs adoptées par la puissante Union générale des travailleurs tunisiens (UGTT) dans l’objectif de les inscrire au même titre que les doléances des médecins et universitaires en vue des prochaines négociations relatives aux augmentations spécifiques à certains secteurs, prévues en juillet prochain.


« Il s’agit, aussi, de conclure des accords visant à améliorer les conditions de vie de l’ingénieur tunisien qui a lui aussi droit à une vie digne, en vertu de la Constitution » a martelé Kheriji, qui a rappelé au passage que la Tunisie ne dispose pas d’Instance nationale dédiée à l’accréditation des ingénieurs, notant que l’OIT œuvre à résoudre ce problème aussi tôt que possible, d’autant plus que l’accréditation est le principal indicateur de la qualité de la formation. Une condition préalable pour exercer la profession d’ingénieur en Tunisie comme à l’étranger.


En attendant, l’OIT a décidé par anticipation de n’enregistrer aucun ingénieur, diplômé d’un établissement public ou privé non accrédité, à l’horizon 2021 – 2022.

Seif Soudani