Tunisie. Mondher Zenaidi condamné à 19 ans de prison dans un climat de répression judiciaire

 Tunisie. Mondher Zenaidi condamné à 19 ans de prison dans un climat de répression judiciaire

Depuis son entrée en campagne électorale en 2024, Zenaidi multipliait les apparitions vidéo publiées sur les réseaux sociaux et virulentes à l’égard du pouvoir qu’il accuse de « populisme »

La justice tunisienne a condamné Mondher Zenaidi, ancien ministre et figure politique connue de l’ère Ben Ali, à 19 ans de prison, avec exécution immédiate de la peine. Le verdict a été rendu par contumace, l’accusé exilé en France n’ayant pas comparu aux audiences du procès.

Selon les éléments rendus publics, Zenaidi a été reconnu coupable de plusieurs chefs d’accusation graves, notamment liés à la sécurité de l’État et à la participation présumée à une entente qualifiée de terroriste. Des accusations que ses soutiens et plusieurs organisations de défense des droits humains jugent « disproportionnées », voire « dénuées de fondements solides ».

Pour le Centre pour le respect des libertés et des droits de l’homme (CRLDHT), cette condamnation repose sur des incriminations « désormais génériques » et s’inscrit « dans une logique de criminalisation de l’opposition politique ». L’organisation estime en effet que les garanties d’un procès équitable n’ont pas été pleinement respectées, dans un contexte où la justice est accusée d’être de plus en plus instrumentalisée.

Mais pour les détracteurs de Zenaidi, cette décision de justice est « proportionnelle au péril que pose la réactivation des anciens réseaux dormants de l’ex dictature bénaliste et dont pourrait jouir Zenaidi » qui avait eu des velléités présidentielles jusqu’aux élections de 2024.

 

Un climat politique et judiciaire sous tension

Cette affaire intervient quoi qu’il en soit dans un contexte politique marqué par une concentration du pouvoir depuis les mesures exceptionnelles prises à partir de 2021. La dissolution du Parlement, la réforme du Conseil supérieur de la magistrature et la multiplication des poursuites judiciaires contre des opposants ont profondément redessiné le paysage institutionnel tunisien.

Aux yeux de nombreux observateurs, la condamnation de Mondher Zenaidi constitue un signal supplémentaire adressé aux acteurs politiques critiques du pouvoir en place. Face à cette vague de condamnations, des organisations internationales dénoncent un usage particulièrement extensif des lois antiterroristes. Pour de nombreux analystes, l’affaire Mondher Zenaidi illustre une nette tendance : l’extension du domaine de l’accusation de terrorisme « est devenue l’un des principaux leviers de gestion du champ politique », au risque d’accentuer la polarisation en dépit de la popularité tout aussi nette dont bénéficie encore le pouvoir exécutif.

Amateur de football, Zenaidi fut président de l’Espérance sportive de Tunis de 1986 à 1987. Il fait son entrée au gouvernement dès 1987 comme secrétaire d’État auprès du ministre de l’Économie nationale chargé de l’Industrie. Il est élu député de Kasserine en 1989 et occupe de 1991 à 1994 le poste de vice-président de la Chambre des députés. À la fin de son mandat, il reprend la direction de divers ministères sous le régime de Zine el-Abidine Ben Ali : Transport (1994-1996), Commerce (1996-2001), Tourisme, Loisirs et Artisanat (2001-2002), Tourisme, Commerce et Artisanat (2002-2004), Commerce (2004-2005), Commerce et Artisanat (2005-2007) et enfin de la Santé (2007-2011).