Que peut-on attendre de la saison touristique 2020 ?

 Que peut-on attendre de la saison touristique 2020 ?

Une suite à la Badira


Au moment où la plupart des gouvernements européens demandent à leurs ressortissants de ne pas partir en vacances à l’étranger cet été, le président de la Fédération tunisienne de l’hôtellerie ne se fait pas d’illusions : pour lui, il n’y aura tout simplement pas de saison touristique 2020.



Emu, Salah Amamou, président de la Fédération nationale de l'Artisanat, a déploré le manque d'assistance des banques, affirmant que le secteur a enregistré ses premiers cas de suicide  


 


Faisant contre mauvaise fortune bon cœur, plusieurs établissements hôteliers de prestige se sont joints récemment à l’effort national en cours pour accueillir des candidats au confinement obligatoire de retour de voyage, à l’image de La Badira, l’un des 5 étoiles les plus en vue de Hammamet : « Ravie d’accueillir mes compatriotes rentrés de l’étranger ce soir pour 14 jours » déclare ainsi sa gérante, Mouna Allani Ben Halima.


Lucide, cette dernière affirme qu’il n’y aura point de tourisme cette année : « Même s’il est possible d’ouvrir certains en septembre, les hôtels resteront quand même fermés. 7.000 chambres ont été mises gratuitement à la disposition du ministère de la Santé à ce jour pour accueillir les citoyens bloqués à l’étranger. »


Ainsi selon la même source, alors que l’Etat a commencé à préparer le déconfinement progressif, le secteur de l’hôtellerie, de la restauration et des cafés demeure le secteur qui subira de plein fouet la crise, sachant que le secteur du tourisme est toujours affecté par la crise de 2015 (liée aux attentats terroristes, ndlr).


Pour le président de la Fédération, Khaled Fakhfakh, les quatre marchés classiques du secteur du tourisme tunisien seront défaillants cet été : « à commencer par le marché de l’Europe de l’ouest qui est définitivement perdu pour cette saison, en passant par les russes, dont on ignore qu’ils vont venir ou pas, en arrivant au marché algérien qui sera, très certainement, impacté par la crise du pétrole et la peur de la pandémie. Quant au marché intérieur tunisien, même s’il venait à repartir complètement, il ne représenterait que 10% à peine du marché global de 2019 ».


 


Oublier le marché français


Il y a quelques jours, Edouard Philippe, qui s'exprimait sur la situation de l'épidémie en France et les perspectives de déconfinement de l’autre côté de la Méditerranée, a abordé la question des vacances estivales. Le Premier ministre a déconseillé de prévoir des voyages loin de la France, jugeant la chose déraisonnable : « Est-ce que l'on peut réserver une maison, une location, une place de camping ou un hôtel au mois de juillet ou au mois d'août en France ou à l'étranger ? Je crains qu'il ne soit pas raisonnable d'imaginer voyager loin à l'étranger très vite ». Sous la mandature du ministre du Tourisme René Trabelsi en 2019, le marché français, vital pour le tourisme en Tunisie, était en pleine reprise.


Un peu plus optimistes, d’autres voix se veulent pourtant rassurantes, à l’instar du président de l’Observatoire du tourisme Afif Kchouk, qui écrit dans une tribune le 22 avril : « Le Coronavirus ne tuera pas le tourisme tunisien. N’oublions pas que nous ne sommes qu’au mois d’avril et qu’il reste encore 8 mois, les plus importants de l’année : les trois mois d’été et l’arrière-saison. Personne ne peut prédire, à l’état d’aujourd’hui, comment va évoluer la pandémie du Covid-19. En Tunisie, le coronavirus est en train d’être maîtrisé. La saison touristique dépendra des marchés tunisien, algérien et russe. N’oublions pas qu’en 2019, plus de 68% des arrivées touristiques ont été réalisées par les Algériens, les Libyens et les Tunisiens résidant à l’étranger, qui ont effectué plus de 32% des nuitées de l’hôtellerie tunisienne, que les Russes ont totalisé 23 % des entrées européennes et 33,5% de leurs nuitées. »


 


200 millions de pertes par jour


En attendant, les mesures prises en marge de la propagation du virus auraient déjà coûté à l’économie nationale des milliers de milliards de dinars tunisiens. C’est en tout cas ce qu’a fait savoir l’économiste Ezzdinne Saidane, pour qui la facture « 200 millions de dinars tunisiens sont perdus quotidiennement, soit 1200 millions de dinars chaque semaine, en raison des mesures préventives dont essentiellement la suspension des activités de certains secteurs et le confinement sanitaire général ».


 


En Tunisie, rappelons que le confinement sanitaire général imposé par les autorités tunisiennes depuis le 22 mars dernier prendra progressivement fin le 3 mai prochain, avec un déconfinement sélectif à la clé et un allègement du couvre-feu nocturne qui a commencé dès ce soir 24 avril dès l’entame du ramadan. Selon les dernières statistiques en date, le pays compte 918 cas déclarés pour 38 décès.

Seif Soudani