Lobbying. Le Sénat dans l’agenda d’Israël

Photo : LIONEL BONAVENTURE / AFP
Qu’est-ce qu’un lobby israélien pourrait bien apprendre aux députés sur « les violences sexuelles en temps de guerre », si ce n’est la propagande au service de l’État hébreu et de son « armée la plus morale du monde », dont les soldats n’hésitent pas à violer femmes et hommes palestiniens, comme le dénoncent de nombreuses ONG indépendantes ? C’est Mediapart qui a soulevé le lièvre, jetant une lumière crue sur cette rencontre qui devait être organisée ce lundi au Sénat français.
On apprend ainsi que le 10 novembre, le Sénat accueillait la deuxième édition d’un « sommet annuel » de la Coalition mondiale des femmes contre les violences basées sur le genre utilisées comme armes de guerre, sous le patronage de la sénatrice centriste Dominique Vérien, présidente de la délégation aux droits des femmes au Palais du Luxembourg.
Aurore Bergé, la ministre déléguée chargée de l’Égalité, devait intervenir en amont d’une table ronde. Le programme de l’événement annonçait aussi la présence de Manuel Valls, d’élu·es français·es et étranger·es, dont des représentant·es du gouvernement israélien, de juristes et d’ONG.
La présence de membres du gouvernement israélien à cette manifestation soulève des questions embarrassantes pour les parlementaires, mais également pour l’exécutif, quant à l’indépendance de la diplomatie et de la politique française dans le conflit à Gaza.
D’après l’enquête de Mediapart, un document officiel accessible sur le site de l’administration des marchés publics d’Israël confirme l’aval pour une enveloppe de 72 000 euros consacrée à cette rencontre, formalisée par un contrat signé le 17 août dernier avec Elnet, illustrant un financement direct de l’État hébreu dans la prise en charge partielle du colloque.
Une intervention du gouvernement israélien, en contradiction avec les déclarations officieuses du lobby pro-israélien Elnet (European Leadership Network), qui a toujours soutenu qu’il n’acceptait que les contributions privées, clamant une totale indépendance vis-à-vis du gouvernement israélien.
Officiellement, l’objectif du colloque est de renforcer la coopération mondiale contre les violences faites aux femmes dans les zones de conflit, en promouvant la justice internationale et la prévention. Mais, selon l’enquête des journalistes, la discrétion était assumée puisque le colloque n’a été ni annoncé publiquement ni présenté à l’ensemble des parlementaires.
Ce qui confirme, une fois de plus, une participation d’Israël qui profite d’une relative opacité, malgré la législation imposant aux cabinets de lobbying de déclarer leurs activités et de désigner clairement l’origine de leurs financements auprès de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP).
Il faut savoir qu’Elnet mène depuis près d’une décennie une campagne systématique pour renforcer les liens entre la France et Israël, ciblant plus spécifiquement les parlementaires français. Et depuis le 7 octobre 2023, de nombreux voyages ont été offerts à des élus français pour arracher leur soutien à la politique israélienne dans les territoires occupés.
