Discrimination : surmortalité maternelle les femmes noires aux États-Unis

 Discrimination : surmortalité maternelle les femmes noires aux États-Unis

Les femmes noires ont trois fois plus de risque de mourir d’une grossesse que les femmes blanches aux États-Unis en raison notamment de la discrimination dont elles font l’objet.

Le taux de mortalité maternelle aux États-Unis a encore augmenté en 2020 pour atteindre un plus haut depuis un demi-siècle. Selon ces nouvelles données, les femmes noires ont trois fois plus de risque de mourir d’une grossesse que les femmes blanches. Une surmortalité qui n’est pas qu’une question de classe sociale ou de revenus, mais aussi de discrimination.

La mortalité maternelle est définie par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) comme un décès survenu au cours de la grossesse ou bien dans les 42 jours suivants, pour une cause liée ou aggravée par cette grossesse ou sa prise en charge. Au total, 861 femmes sont ainsi décédées aux États-Unis en 2020.

Le taux de mortalité maternelle y est de 23,8 décès pour 100 000 naissances, selon un rapport du National center for health statistics publié mercredi. Il s’agit du pire taux parmi les pays industrialisés. Le Canada enregistre par exemple un taux de mortalité maternelle de 7,5 décès pour 100 000 naissances, selon les statistiques de l’OCDE pour la même année. La situation américaine n’a cessé en outre d’empirer ces dernières années. Le taux était de 20,1 décès pour 100 000 naissances en 2019, et de 17,4 en 2018.

La mortalité maternelle a reculé dans le monde au 20e siècle grâce aux avancées médicales. Mais depuis les années 2000, les États-Unis sont donc de nouveau sur la mauvaise pente. La « plupart des pays comparables ont une certaine forme de couverture maladie universelle », note Eugene Declercq, professeur spécialisé dans ce domaine à l’Université de Boston. Si les États-Unis ont fait des progrès en matière de soin à la naissance, « le fait est que les femmes démarrent leurs grossesses en moins bonne santé », explique-t-il. Un accès difficile à l’avortement — de plus en plus compliqué dans les États conservateurs — a également provoqué davantage de complications maternelles, selon une étude de 2021.

 

Inégalités et préjugés

Les données américaines révèlent surtout des inégalités criantes. En 2020, le taux de mortalité maternelle était ainsi de 55,3 pour 100 000 naissances parmi les femmes noires, contre 19,1 chez les femmes blanches. L’explication ne peut se résumer à des différences de classe et de revenu entre ces deux populations.

En 2016, une étude des Centres de prévention et de lutte contre les maladies (CDC), principale agence sanitaire du pays, a montré que le risque de décès maternel était toujours plus élevé de 60 % pour une femme noire avec un diplôme universitaire que pour une femme blanche n’ayant pas été plus loin que le lycée. Ebony Hilton, anesthésiste à l’Université de Virginie, et experte des disparités dans l’accès aux soins de santé, rappelle qu’il « a été maintes fois démontré que les femmes noires ne reçoivent pas le même niveau de soins » aux États-Unis en raison de discrimination.

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Une autre étude publiée en 2020 dans la revue PNAS avait examiné les naissances en Floride entre 1992 et 2015. Elle concluait que les nouveau-nés noirs avaient trois fois plus de risque de mourir que les blancs. Mais ce risque diminuait lorsque le médecin était également noir. Début 2021, le gouvernement du président Joe Biden avait qualifié le taux de mortalité maternelle américain d’« inacceptable ». Il avait annoncé des investissements pour s’attaquer à ce problème, par exemple en finançant des programmes de formation aux « préjugés inconscients » pour les personnels de santé.

Rached Cherif