Loi sur l’université : l’écologiste Pouria Amirshahi reconnaît « une erreur » dans son vote

Pouria Amirshahi, député écologiste, reconnaît une erreur de vote sur la loi controversée sur l’université.. (Photo par Bertrand GUAY / AFP)
Après deux jours de débats animés, l’Assemblée nationale a adopté, le 7 mai, la proposition de loi relative à la lutte contre l’antisémitisme, le racisme, les discriminations, les violences et la haine dans l’enseignement supérieur. Ce texte est porté par Constance Le Grip (Ensemble pour la République) et Pierre Henriet (Horizons).
C’est principalement l’article 3, portant sur les sanctions disciplinaires, qui a cristallisé les tensions dans l’hémicycle. Supprimé en commission, il a été réintroduit par un amendement des rapporteurs. Cet article prévoit la création, dans chaque région académique, d’une section disciplinaire commune aux établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel, placée sous l’autorité du recteur.
Le ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, Philippe Baptiste, a précisé que cette instance ne pourrait être saisie que par le président ou le directeur d’un établissement, s’il décide de transférer une procédure disciplinaire hors de sa structure. Selon lui, cette mesure respecte pleinement la liberté et l’autonomie des universités.
Mais pour Louis Boyard (La France insoumise), cette instance pourrait devenir une « juridiction arbitraire » sans fondement juridique clair, susceptible d’être modifiée par simple décret. Il craint qu’elle ne soit utilisée comme un outil de répression politique, notamment contre les étudiants mobilisés autour de la situation à Gaza, mettant potentiellement en danger le droit fondamental à manifester.
Ce tournant législatif, soutenu par certains membres du Parti socialiste et des Écologistes, a suscité l’indignation et l’incompréhension de nombreux militants. Certains dénoncent un reniement des valeurs de liberté universitaire et de soutien aux luttes étudiantes. D’autres vont plus loin, accusant les soutiens de ce texte de chercher à criminaliser toute critique d’Israël, et les tenant pour complices d’une politique coloniale et de l’extermination en cours du peuple palestinien.
Parmi les députés mis en cause, l’écologiste Pouria Amirshahi reconnaît aujourd’hui une « erreur », qu’il affirme vouloir corriger lors du vote final en commission mixte paritaire (CMP).
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Vous avez été vivement interpellé sur les réseaux sociaux après le vote de l’amendement rétablissant l’article 3. Que s’est-il passé ?
Pouria Amirshahi : Je reconnais que ce vote a été une erreur. Elle sera corrigée dans les prochains jours, lors du vote définitif en commission mixte paritaire (CMP). Mon nom ne figurera pas parmi les votes favorables.
Comment cette erreur a-t-elle pu se produire ?
Je n’étais pas présent le jour du vote. J’avais donné une délégation de vote à un collègue qui a pensé que l’article 3 avait été vidé de sa substance. Une fois le vote enregistré, il était malheureusement impossible de le modifier.
Pourquoi êtes-vous opposé à ce texte ?
Sur le papier, la loi vise à lutter contre le racisme et les discriminations : un objectif que je partage pleinement. Et d’ailleurs les écologistes ont permis d’améliorer certaines choses et combattu certaines dispositions. Mais dans les faits, elle est marquée par une tentative d’instrumentalisation par une droite de plus en plus radicalisée. Derrière ce texte, je vois une volonté de museler certaines expressions, en particulier dans le monde universitaire.
Certains vous accusent de trahir vos engagements…
Je n’ai jamais soutenu — et je ne soutiendrai jamais — une loi qui restreindrait la liberté d’expression des étudiants ou leur droit à se mobiliser. Mon engagement pour la cause palestinienne est constant et ne date pas d’hier. Je continue de dénoncer les actions du gouvernement israélien, que je considère profondément injustes et criminelles.
Considérez-vous l’ensemble du texte comme problématique ?
Non, il faut faire preuve de nuance. La gauche a aussi obtenu que toutes les formes de discrimination soient explicitement visées par le texte. Ce n’est donc pas le « musée des horreurs » que certains décrivent. Mais plusieurs dispositions techniques posent question sur le plan universitaire. Et, plus largement, ce débat révèle les névroses politiques de notre époque.