Il y a 24 ans, Brahim Bouarram mourait noyé, tué par des militants du Front national

 Il y a 24 ans, Brahim Bouarram mourait noyé, tué par des militants du Front national

Une gerbe de fleurs jetée dans la Seine par le MRAP


C'était il y a 24 ans jour pour jour. Et pour les proches de la famille de Brahim Bouarram, c'est comme si c'était hier. 


« J'étais tout petit quand le drame est arrivé mais je m'en souviens encore. Et je m'en souviendrai toute ma vie », nous a confié ému Said, le fils de Brahim, qui n'avait que 9 ans au moment de la mort de son père.


Le 1er mai 1995, vers 11h30, sur le pont du Carrousel du Louvre, trois skinheads, venus manifester aux côtés du Front national pour l'hommage annuel à Jeanne d'Arc, se dirigent en courant vers les quais de Seine.


Brahim Bouarram, un Marocain de 29 ans profite d’une journée ensoleillée sous le pont du Carrousel à Paris. Il marche tranquillement sur les berges. Les militants du Front national l'aperçoivent : trois d'entre eux agressent Brahim avant de le jeter dans la Seine. En quelques minutes, tout est plié. Brahim Bouarram, un épicier, papa de deux enfants, meurt quelques minutes plus tard, noyé.


Un assassinat qui intervient quelques mois après celui d'Ibrahim Ali, un jeune de 17 ans, abattu dans le dos à Marseille le 22 février 1995, d'une balle de calibre 22 long rifle, tirée par un colleur d'affiche du FN.


À une semaine du deuxième tour de l'élection présidentielle de 1995, le meurtre a eu un retentissement national. Deux jours plus tard, le président sortant, François Mitterrand, rend hommage à la victime en jetant un brin de muguet dans la Seine, à l'endroit ou Brahim Bouarram s'est noyé. Ce même jour, une manifestation réunit 12.000 personnes contre le racisme.


Jean-Marie Le Pen, alors président du Front national déclare peu après : "Je regrette qu'un malheureux se soit noyé, mais dans une agglomération de 10 millions d'habitants, ce genre de fait divers peut toujours se produire, ou même être créé à volonté."


Pour ne pas oublier cet ignoble assassinat, depuis 24 ans, partis de gauche, associations, militants et anonymes se donnent rendez- vous chaque 1er mai sur le pont du Carrousel du Louvre, à Paris, où a donc eu lieu le drame. "24 ans après l’assassinat raciste de Brahim, la "bête immonde" est toujours présente.


Une série d’actes antisémites ont eu lieu ces derniers temps en France : le portrait de Simone Veil défiguré par une croix gammée, les arbres souvenir d’Ilan Halimi abattus, "Juden" tagué sur une vitrine de magasin, des quenelles réapparaissent ici ou là, des cimetières juifs profanés", dénoncent les militants du MRAP (Mouvement contre le racisme et pour l'amitié entre les peuples).


"Des députés ont reçu des insultes et menaces de mort à caractère raciste sous prétexte, que "des Noirs sont indignes de représenter leurs concitoyens français au Parlement", qu’ils restent des "fainéants arriérés", se comportant "comme des rats qu’il convient d’éliminer", embraie le MRAP. 


La ligue des droits de l'homme (LDH) rappelle que "depuis l’assassinat de Brahim Bouarram, le racisme a fait d’autres victimes en France et dans d’autres pays, récemment l’assassinat de 50 personnes  par un islamophobe dans deux mosquées en Nouvelle Zélande". 


"Vingt-quatre ans  plus tard, le racisme a aussi gangrené la société sous d’autres formes : la xénophobie, l’antisémitisme, l’islamophobie, la ségrégation, la relégation, les discriminations aux droits fondamentaux, au logement, au travail, aux contrôles en tous genres. C’est toujours sous d’autres formes que le racisme s’enracine, avec la montée des extrêmes droites et des droites extrêmes. A cela s’ajoutent les violences policières, les contrôles au faciès, les rôles plus que douteux de certains médias, une justice à géométrie variable dès qu’il s’agit d’enfants d’immigrés et de leurs parents. L’instrumentalisation systématique des discours sur l’Islam et la laïcité qui encouragent et instaurent la montée de la haine, alors qu’une démocratie digne de ce nom se doit de réaffirmer l’égalité entre tous ses citoyens, dans le respect de leurs origines et leurs croyances" martèle la LDH. 


 

Nadir Dendoune