Congrès Tahya Tounes : Youssef Chahed officialise son entrée en pré-campagne

 Congrès Tahya Tounes : Youssef Chahed officialise son entrée en pré-campagne

Sans cravate


Le chef du gouvernement en exercice Youssef Chahed a déclaré le 1er mai, en marge de la clôture des travaux du congrès constitutif du mouvement Tahya Tounes, que « le gouvernement bénéficie désormais d’un soutien politique fort ». Une façon de répondre aux détracteurs de l’absence de légitimité gouvernementale, suite aux multiples départs et scissions partisanes, au terme d’une année et demie d’exercice tumultueux du pouvoir.


 



    Slim Azzabi a revendiqué 70 mille adhésions écoulées en une semaine. Un chiffre étonnant en Tunisie où le désintérêt du fait politique est pourtant croissant


 



Clairsemée au départ, la salle couverte de Radès s'est progressivement remplie de renforts issus de l'intérieur du pays


 


« Le gouvernement n’est plus isolé aujourd’hui. Grâce au mouvement “Tahya Tounes” et au bloc de la coalition nationale à l’Assemblée des représentants du peuple, le gouvernement bénéficie désormais d’un soutien politique fort », a ainsi martelé le quadragénaire lors de ce congrès en forme de messe officielle qui signe son entrée précoce et pour certains controversée en pré-campagne électorale.


« C’est le gouvernement qui tire parti de Tahya Tounes, et non le contraire », a-t-il conclu, notant que « les moyens de l’Etat ne doivent être ni au service de Tahya Tounes, ni d’aucune autre partie ou parti politique », allusion aux récurrentes suspicions de détournements de moyens de l’Etat à des fins politiques.  


 


Tahya Tounes et le parallèle macroniste


Surfant sur son concept quasi « copyrighté » de la guerre contre la corruption qui n’est pas sans rappeler la promesse avortée du « nouveau monde » d’Emmanuel Macron lors de la campagne de 2017,  Chahed a soutenu, qu’il est « déterminé à faire appliquer la loi, à lutter contre la corruption, à mener la réforme des caisses sociales, à assurer la sécurité et la stabilité, à attirer les investissements et à relancer les exportations et l’économie nationale ».


« Aujourd’hui, nous avons besoin d’un mouvement politique démocrate et centriste qui croit aux valeurs fondamentales de la démocratie et en l’Etat. Un mouvement qui rassemble les forces actives et toutes les sensibilités de la famille patriotique », a-t-il ajouté.


Plus qu’un centrisme, ce discours tenu par des dirigeants jeunes de centre-droit, que l’on pourrait qualifier de « post politique » ou encore post idéologique, correspond à une vision en réalité apolitique du monde, une vision libérale, qui a réussi à s’imposer en France lors du scrutin présidentiel de 2017, auto proclamée rempart contre les nationalismes en Occident et futur rempart technocratique contre l’islam politique moribond au Maghreb, mais qui se heurte, ici aussi, à une farouche opposition souverainiste, à gauche notamment, qui y voit une inféodation à des bailleurs de fonds de la finance internationale.


Probablement conscient des faiblesses identitaires de son mouvement naissant, Youssef Chahed a cependant insisté sur la nécessité de « faire preuve de dévouement envers la patrie pour pouvoir continuer sur la voie du projet moderniste du leader Habib Bourguiba qui, a-t-il dit, a misé sur la richesse humaine, l’éducation et la santé publiques, ainsi que sur la femme pour bâtir un Etat moderne ». Une façon de s’ancrer, lui aussi dans la filiation bourguibiste, sorte d’orthodoxie rituelle partagée par l’ensemble des partis dits modernistes en Tunisie.


Chahed a enfin déclaré avoir demandé au secrétaire général de Tahya Tounes d’augmenter la représentativité de la femme et de renforcer sa présence dans toutes les structures du parti, y compris dans les organes de décision. Lors de sa prise de parole (vidéo ci-dessus), Slim Azzabi a surenchéri en la matière en promettant « une égalité homme – femme intégrale », tout en évoquant les thématiques en vogue type hashtag « Me too », conscient aussi sans doute de l’enjeu électoral féministe.


 

Seif Soudani