Tunisie. Arrestation de l’avocat Ahmed Souab

Contre toute attente, un juge d’instruction du pôle judiciaire de lutte contre le terrorisme a ordonné, ce lundi 21 avril, la mise en garde à vue du célèbre avocat et ancien magistrat administratif Ahmed Souab, dans le cadre d’une enquête ouverte pour plusieurs chefs d’inculpation liés à des actes terroristes.
Cette mesure intervient à la suite de la diffusion d’une vidéo, datée du 19 avril 2025, dans laquelle l’avocat apparaissait aux abords du siège de la Maison de l’Avocat au moment de faire une déclaration concernant le déroulement qu’il estimait inacceptable du procès de ses clients dans l’affaire de complot contre la sûreté de l’Etat. Il y affirmait alors : « Cela n’engage que moi, mais les couteaux ne sont pas sous la gorge des détenus… c’est plutôt président de la chambre qui va statuer sur de nombreux dossiers qui a le couteau sous la gorge dans de nombreux dossiers », a-t-il déploré, tout en mimant un geste d’égorgement avec la main au niveau du cou.
Pour ses proches et ses confrères avocats, ce propos ne souffrent d’aucune ambiguïté, dans la mesure où Souab entendait insinuer que le corps de la magistrature agit ces dernières années en Tunisie dans un climat de peur.
Plusieurs charges évoquées
Or, selon la porte-parole du pôle judiciaire antiterroriste, le parquet général près la Cour d’appel de Tunis a autorisé l’ouverture d’une enquête judiciaire contre Ahmed Souab pour des accusations graves, notamment de « menaces de commettre des actes terroristes dans le but de contraindre une personne à agir ou s’en abstenir, mise en danger de la vie d’une personne protégée, et menaces passibles de sanctions criminelles ». Autre article de loi mentionné pour motiver la garde à vue de l’ex magistrat, l’article 54 criminalisant la diffusion de fausses nouvelles sur les réseaux électroniques.
Par ailleurs, la même source a indiqué que la scène en question a été dûment constatée par l’unité nationale de recherche sur les crimes terroristes, qui a établi un rapport transmis par le ministère public au procureur général, compte tenu du statut professionnel de l’intéressé relevant du barreau. L’instruction a par conséquent été ouverte « au vu de la gravité des propos et des gestes tenus, et après avoir respecté les procédures légales applicables au statut d’avocat », a-t-elle précisé.
Dans la matinée, une dizaine d’agents des forces de l’ordre ont interpellé Ahmed Souab à son domicile avant de le conduire au siège du pôle judiciaire de lutte contre le terrorisme, a affirmé son fils Saeb Souab qui a appelé à un rassemblement de protestation à Tunis, avant d’être à son tour perquisitionné et questionné par le Pôle antiterroriste.
En vertu de la loi antiterroriste de 2015, tout individu placé en garde à vue dans le cadre de ladite loi n’a pas droit à un avocat durant les premières 48 heures d’une détention qui peut être prolongée à cinq jours renouvelables.