Décès du moine Shumacher – Son message à Zemmour

 Décès du moine Shumacher – Son message à Zemmour

Inhumation du père Jean-Pierre Schumacher au monastère de Midelt, mardi 23 novembre 2021, en présence de Faouzi Skali et du Cardinal du diocèse de Rabat. Photo : DR

Agé de 97 ans, Jean-Pierre Schumacher est décédé. Ce dernier rescapé du massacre du monastère de Tibhirine a été inhumé au Maroc le mardi 23 novembre. Laissant derrière lui un message fort.

 

Pour les amateurs de trash, ceux qui espèrent toujours démonter la pelote de ce crime abject, il va falloir repasser. Aux amateurs de thrillers, qui pensent que cette disparition va permettre de jeter la lumière sur les commanditaires de l’enlèvement et l’assassinat de ces Sept moines en Algérie en 1996, il faut leur dire que ce dernier survivant du massacre de Tibhirine n’a laissé aucune indication.

Les ruses de l’histoire sont implacables, un jour ou l’autre, on aura bien les détails sordides de cette affaire où le DRS (Services secrets algériens) sont impliqués jusqu’au cou et dont la DGSE (Services secrets français) connaît les moindres détails.

Ce qui nous intéresse dans cette mort, c’est la vie, la vie de ce religieux « décédé dans la sérénité au monastère Notre-Dame de l’Atlas, à Midelt », comme annoncé par l’Eglise chrétienne du Maroc.

Le père Jean-Pierre Schumacher, après la tuerie du monastère de Tibhirine, s’était installé au Maroc où il était devenu le prieur d’une communauté de moines trappistes de l’Ordre cistercien dans l’Atlas marocain.

« En 1993, nous avions décidé que s’il n’était plus possible de vivre en Algérie, nous irions dans un autre pays musulman. Au Maroc, à Fès, puis à Midelt. C’est la parole d’Isaïe qui nous anime : « Il n’y aura plus qu’un petit reste, et la souche reverdira. « Que ce tronc décapité reverdisse, c’est encore notre prière aujourd’hui. Et notre espérance », confiait-il, en 2012, aux journalistes du Pèlerin. Une sorte de testament avant l’heure en quelque sorte.

Que confirment d’ailleurs les amis du défunt, comme Faouzi Skalli, le président du Festival de Fès de la Culture Soufie qui se rappelle bien le personnage, « car si on voulait bien résumer la vie de ce passionné qu’était Jean-Pierre Schumacher, on ne peut oublier la douceur, l’empathie et la disponibilité de cet homme qui s’appliquait pour faire grandir le règne de Dieu, à promouvoir un message de paix, de justice, de liberté, de fraternité, de vie, et surtout d’amour entre gens de confession différentes. Et les marocains le lui rendaient bien d’ailleurs ».

Quand des hommes comme le père Schumacher partent, c’est toute une vision du monde qui disparaît, un pied de nez au « Paix aux hommes de bonne volonté » que s’échangeaient les Français à Noël jusqu’à une date relativement récente, et pourtant les Zemmour et compagnie devraient en prendre de la graine.

Si l’Église souffre aujourd’hui d’une crise des vocations, la politique est encore plus touchée, ou du moins, ceux qui briguent aujourd’hui les sommets, à l’instar d’un Zemmour n’ont aucune profondeur et en tout cas, ce ne sont pas les bons qui rêvent d’accéder à la présidence. D’où les bêtises proférées par les uns et les autres sans égard pour l’intelligence du citoyen lambda.

« Pour être efficace, il faut cacher ses intentions », conseillait Machiavel. Celui-là qui veut interdire les pronoms arabes avant même de présenter sa candidature aux présidentielles non seulement ne cesse de tromper, de mentir, de cacher combien de « Mohamed » ont donné leur sang pour sauver la France, mais ne cesse de déverser son ingratitude envers nombre d’honorables « arabes », devrait écouter ceux qui (comme ce moine, ont choisi d’aller vivre au sein de « ces barbares », berbères dont est issu justement le sieur Zemmour, pour qui ne le saurait pas encore.

Si ces personnages (Zemmour n’est que l’archétype du candidat nauséabond idéal) sont si désireux de rendre l’histoire du pays à ceux qui la font, ils doivent savoir que si la guerre est perdue, c’est tout simplement faute de combattants, les arabes vont remplacer « les Français » de souche; c’est peut-être vrai mais que faire contre l’épée de Damoclès de la démographie ?

Maintenant, pourquoi ne pas préparer l’Hexagone à se hisser au podium des nations qui ont su reprendre à leur compte ce message du Christ : « Soyez en paix et n’ayez pas peur » !

Les nouveaux maîtres du monde se sont-ils un jour interrogés sur la signification du mot « paix », « schalom » ? Cette réconciliation de chacun avec soi-même et avec les autres, la destruction des murs de séparation, l’espoir d’une mondialisation heureuse, seule garantie de l’universalisme des peuples.

Une réalité qu’ont bien saisie les hommes de Dieu qui ont décidé (tels que le père Jean-Pierre Schumacher) de venir vivre et mourir au sein des « Sarrasins » dans ce beau royaume de la spiritualité où les mêmes saints sont vénérés par les fidèles des trois religions.

Au Maroc, les hommes de l’église qui ont fait le choix de s’installer dans ce pays ont eu le génie de se fondre dans le paysage local, sans aucune velléité d’évangélisation des populations. Des hommes d’une grande valeur humaniste (dont j’ai côtoyé certains comme le père Levrat) qui se sont contentés de prouver par leur humilité, la réalité de l’universalisme du peuple de Dieu durant les 800 ans de la présence franciscaine dans le pays.

Ils n’étaient pas là pour délivrer l’humanité de ses antagonismes inextricables plus qu’ils ne se sentaient investis de la délicate mission de refaire entre tous les hommes ce lien que des hommes comme Zemmour s’attèlent aujourd’hui à défaire.

 

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