Noël de plus en plus fêté par les Tunisiens

 Noël de plus en plus fêté par les Tunisiens

Ulysse Hyper Distribution appartenant au groupe Taoufik Chaïbi / Carrefour Tunisie


Depuis la mi-décembre, difficile en Tunisie de contourner dans les grandes surfaces les vastes rayons, de plus en plus imposants au fil des ans, consacrés spécifiquement aux accessoires des fêtes de Noël, en sus de ceux du nouvel an. Qui sont ces Tunisiens chaque année plus nombreux à fêter Noël ? Nous sommes allés à leur rencontre.



Crédit photo Seif Soudani / LCDA, Tunis, le 24/12/2018


 


Sapins de Noël dans toutes les tailles imaginables, guirlandes électriques, boules multicolores et autres accessoires et ornements en tous genres… Tout y est ! Quasiment aucune différence à l’entrée des grandes surfaces de Tunis ou celles de la grande distribution dans les capitales occidentales où trônent dès l’accueil les produits destinés à égayer cette fête chrétienne.


Mais c’est dans cette grande surface de la région de la Marsa, banlieue nord relativement huppée de Tunis, que l’affluence semble la plus importante. Et à y regarder de plus près, c’est plutôt une classe moyenne type « upper middle class », généralement francophone, qui s’empresse le plus au milieu des étalages dédiés.


 


« Faire plaisir aux enfants »   


Autre point commun qui semble faire l’objet d’un consensus quand on interroge les clients qui souhaitent pour la plupart d’entre eux rester discrets voire anonymes, tous martèlent qu’il s’agit d’une demande provenant essentiellement de leurs enfants. « Pourquoi ne pas leur faire plaisir ? C’est vrai que c’est assez cher, mais il suffit qu’un ou une copine de classe se vante d’avoir un sapin à la maison pour que je sois harcelée et sous pression ! », ironise une jeune mère de famille pour expliquer le phénomène d’émulation qui a cours dans les établissements scolaires privés comme publics.


Au hasard des rayons, un peu plus loin, il n’est pas rare d’entendre pester cependant certains autres clients qui murmurent « C’est incroyable, on ne sait plus si on est oui ou non dans pays musulman ! », ou encore « C’est lamentable, notre identité dissout sous nos yeux »… 


C’est que le zèle de nombreux Tunisiens soucieux de célébrer aussi bien les fêtes traditionnelles islamiques et maghrébines que les fêtes telles que Noël, la Saint-Sylvestre ou encore la Saint-Valentin devient un sujet de plaisanteries locales, à propos d’une société en perpétuel état de célébration, pour le grand bonheur des commerçants, les premiers gagnants de ce marketing de l’œcuménisme religieux.


Fortement critiqué en cette fin d’année 2018 pour sa loi de finances 2019 jugée particulièrement avantageuse pour l’hyper distribution (détenue en Tunisie par les familles Mabrouk et Chaïbi), le gouvernement Chahed qui y a décidé de reporter l’application de la taxe sur les grandes surfaces (35%) à janvier 2020, a répondu à la polémique via le ministre du Commerce Omar El Béhi.


Ce dernier a ainsi soutenu que toute hausse d’impôt sur les grandes surfaces entraînerait automatiquement une hausse des prix et donc un recul supplémentaire du pouvoir d’achat des Tunisiens, au moment où l’inflation se stabilise à 7,4%, et risque d’atteindre 8,1% d’ici la fin 2018 selon un récent rapport du FMI. Un mauvais augure qui contraste avec les vœux partout placardés dans les temples de la consommation : Joyeux Noël !  

Seif Soudani