3000 m Steeple : Pourquoi Soufiane El Bakkali a remporté l’or ?

 3000 m Steeple : Pourquoi Soufiane El Bakkali a remporté l’or ?

crédit photo : Wang Lili / XINHUA / Xinhua via AFP

De toutes les épreuves d’athlétisme, le 3000 m steeple est sans doute l’une des plus dures. Il faut de l’endurance, une coordination pour sauter les haies et une réserve pour le sprint final. Depuis des décennies, ce sont les kenyans qui dominent la compétition (9 médailles olympiques). Pourtant, le Marocain, Soufiane El Bakkali en a fait sa spécialité enchaînant les victoires. Il les doit à son mental incroyable mais aussi à un physique hors du commun. Explications.

La victoire de Soufiane El Bakkali  a remis du baume au coeur des marocains. Des années qu’on attend des successeurs à Saïd Aouita ou Hicham El Guerrouj ! Le jeune Marocain a réussi à briser l’ordre établi de la discipline. Si sa victoire est le fait d’un mental et d’une hygiène de vie irréprochable, le coureur a également des prédispositions physiques qui lui permettent d’aller plus loin.

Dans une vidéo établie en 2018, la chaine Olympic Channel fait passer à Soufiane El Bakkali des tests à Manchester dans un centre de haute performance sportive. La série nommée « Anatomy of » permet de mieux comprendre les physiques nécessaires pour 6 sports. Parmi eux, le 3000m steeple. Leur cobaye au physique parfait : Soufiane El Bakkali.

>>Lire aussi : JO de Tokyo : le Marocain Soufiane El Bakkali enfin en or sur 3000 m steeple 

Un taux de graisse corporelle « exceptionnellement bas »

Le 3000 m steeple est brutal. En effet, il faut maintenir des vitesses d’endurance élevées tout en négociant des barrières larges et hautes sans pour autant désynchroniser ses pas et sa course. Dans la discipline, on retrouve des petits gabarits et des formes plus longilignes. Soufiane El Bakkali, pour sa part, bénéficie de la plus grande taille de la compétition (1,91 m) pour un poids de 69,9 kilos.

Mais au delà de sa grande taille, il faut une bonne proportion. Le but est d’être léger et un pourcentage de graisse corporelle très faible. Après lui avoir fait passer un test, l’institut de Manchester découvre qu’il possède un taux de graisse corporelle de 10,7%. « Un chiffre exceptionnellement bas et qui fait partie des plus faibles que je n’ai jamais vu pour un coureur de steeple », explique le docteur en charge des essais. A titre de comparaison, les champions cyclistes sont à 12,3 !

Un environnement marocain favorable à la compétition

Soufiane El Bakkali, comme tous les athlètes marocains, s’entraine en altitude dans les montagnes de l’Atlas. Cela procure à son corps une production plus importante d’hémoglobine qui permet d’augmenter la capacité des muscles à s’approprier de l’oxygène.  On a souvent considéré que si les kenyans gagnaient, cela était dû à leurs conditions d’entrainement en altitude dans leur pays.

Avec leurs tests, les scientifiques de Manchester découvrent que malgré les hautes températures ou l’altitude, Soufiane El Bakkali est capable de maintenir un effort constant à tous les intervalles. Cela lui donne un avantage certain et lui permet ainsi d’économiser ses forces.

Autre difficulté du 3000m steeple, les blessures musculaires. En effet, le coté discontinu de la course et les haies hautes en plus du bassin à franchir, sont autant d’obstacles, notamment pour les quadriceps. Ils provoquent blessures musculaires, rupture de ligaments et autres déconvenues. Grâce à un test pour surveiller les possibilités de blessures, on apprend que Soufiane El Bakkali a une quasi parfaite symétrie de ces muscles gauche et droit. Conséquence : un risque de blessure très faible et une possibilité d’éviter de forcer sur ses muscles.

Des poumons en or et des réserves pour le sprint

En étudiant la Vo2 Max de Soufiane El Bakkali (valeur qui décrit la forme cardiorespiratoire), on apprend comment le coureur marocain bénéficie d’un avantage sur ses concurrents. Le coureur de steeple doit non seulement maintenir un rythme régulier élevé mais il doit aussi s’assurer de franchir les barrières avec le bon pied, ce qui provoque des changements de rythmes permanents sans oublier le sprint final.

Soufiane El Bakkali atteint les 18 km/h pendant une course. Sa VO2 Max est comprise entre 70 et 80 mililitres par kilogrammes/minutes. Avec ses taux, le marocain est capable de courir en endurant une grande intensité tout en économisant son énergie. Cette VO2Max lui permet de mettre la gomme lors du dernier tour. Une sorte de turbo qui n’est pas consommé en course !

Avec ses qualités physiques, mentales et son jeune âge, la carrière de Soufiane El Bakkali n’en est encore qu’à ses débuts. Nul doute qu’avec de tels prédispositions, le coureur marocain devrait remonter sur la plus haute marche du podium sous peu.

 

Yassir Guelzim

Yassir GUELZIM

Journaliste Print et web au Courrier de l'Atlas depuis 2017. Réalisateur de documentaires pour France 5.