Analyse. Pourquoi le Maroc est le grand gagnant de la crise du gaz ?

 Analyse. Pourquoi le Maroc est le grand gagnant de la crise du gaz ?

Centrale à cycles combinés de Tahaddart qui fonctionne au gaz naturel.

Pour ceux qui n’arrivent pas encore à réaliser que le gaz a bien fait son retour au Maroc, il suffit de consulter le site numérique de la société gestionnaire du réseau gazier espagnol Enagas, pour constater de visu que le flux gazier est passé de 0 m3 à 153 000 m3 de gaz par heure à partir de l’Espagne vers le Maroc.

 

Plus encore, l’entreprise allemande Energy Intel a déclaré avoir mis à disposition ses méthaniers à l’ Espagne qui se chargera de transformer le gaz naturel liquéfié (GNL) dans ses usines de regazéification avant de l’envoyer au Maroc via le gazoduc Maghreb-Europe en sens inverse.

Dans les faits, Madrid a réussi au cours des derniers mois à conclure des contrats avec bien d’autres fournisseurs, que l’Algérie, dont les États-Unis, pour pallier l’absence de gaz après la fermeture unilatérale  du gazoduc Maghreb-Europe par l’Algérie. Aussitôt dit aussitôt fait, les deux centrales à cycles combinés de Tahaddart et Aïn Béni Mathar qui fonctionnent à partir du GNL (Gaz Naturel Liquéfié) importé d’Espagne ont repris leur activité le mardi 5 juillet.

Si le Maroc assure ainsi la sécurisation de son approvisionnement en gaz naturel en concluant des contrats d’achat de GNL sur le marché international et en utilisant les infrastructures gazières des opérateurs espagnols et le Gazoduc Maghreb-Europe, c’est bien sûr grâce aux efforts consentis par les différents opérateurs nationaux dont la ministre de l’Energie et de la Transition Leila Benali, mais c’est aussi grâce à l’entregent du souverain dont les contacts au plus haut niveau ont permis de placer le royaume au même plan que les pays européens, désormais unis dans une solidarité sans faille face aux risques de pénurie de sources d’énergie.

Il faut savoir que le Conseil de l’Europe « a définitivement adopté le règlement visant à s’assurer que, malgré les perturbations observées sur le marché du gaz, les capacités de stockage de gaz dans l’UE soient remplies avant la saison hivernale et puissent être partagées entre les États membres, dans un esprit de solidarité ».

Grâce à des négociations menées en moins de deux mois, l’Union dispose dorénavant d’un outil qui impose à chaque État membre d’aborder la période hivernale avec un stockage de gaz suffisant et qui facilite les partages entre pays.

Or selon les informations que nous avons recueillies auprès de Bruxelles, sur cette question, le Maroc jouit d’un statut privilégié dans ces « efforts européens censés renforcer la sécurité d’approvisionnement énergétique de l’Union européenne dans le contexte de la guerre en Ukraine ».

Pour comprendre la magnanimité des Européens pour le Maroc, il faut comprendre que le vieux continent a tout à gagner de conclure un partenariat durable avec ce nouveau dragon et plus spécialement dans le contexte actuel. En effet, la crise énergétique européenne a remis à l’ordre du jour une nouvelle stratégie d’exploration des potentialités de gaz du royaume.

La découverte de gaz au large du Maroc, constitue aujourd’hui un succès sans précédent pour Chariot Energy et un potentiel d’exploitation très prometteur. Au point que les actions de Chariot ont augmenté d’environ 55 % au cours du mois dernier, grâce au programme de forage du puits Anchois-2 au large de la ville de Larache. Une tendance à la hausse qui ne devrait pas s’arrêter si on en croit l’avis des analystes de Berenberg Bank, une banque d’investissement allemande d’envergure internationale.

Sont ainsi citées comme exemple, les sociétés à petite capitalisation telles que Chariot Ltd et Eco Atlantic pour le projet offshore de la première au Maroc, et les actifs de ce dernier en Guyane et en Afrique du Sud. Il faut savoir que le puits Anchois-2 a été foré à une profondeur totale de 2 512 mètres et a rencontré d’importantes accumulations de gaz dans sa cible d’évaluation ainsi que trois cibles d’exploration supplémentaires, couvrant quelque 250 mètres de production brute, des capacités qui ont dépassé les attentes.

Le site, qui est situé dans des eaux peu profondes, à environ 40 km du Gazoduc Maghreb-Europe (GME) (qui exportait du gaz algérien vers l’Europe jusqu’à fin 2021) va certainement assurer la sécurité énergétique du Maroc et permettre à moyen terme de sécuriser l’approvisionnement en gaz de l’Europe.

 

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Abdellatif El Azizi