Maroc. Sus aux rentiers du sable !

 Maroc. Sus aux rentiers du sable !

55% des quelques 20 millions de mètres cube de sable consommés annuellement au Maroc proviennent de l’informel. Photo Marijan Murat / DPA / AFP.


C’est une drôle d’effervescence que celle qui s’est emparé du royaume. Professionnels, médias, et citoyens lambda alimentent de plus en plus la polémique née de la publication par le ministère des Transport d’une liste de bénéficiaires d’agréments de transport routier. La pression augmente pour que cette démarche soit appliquée à d’autres secteurs réputés pour incarner l’économie de rente, comme celui de l’exploitation des carrières de sable.




 


En ligne de mire, les taxis, les agréments de pêche hauturière, mais surtout les autorisations d’exploitation de carrières de sable, une véritable richesse nationale qui échappe à tout contrôle. Un dossier sensible à plus d’un titre, principalement en raison de ses implications économiques, mais aussi sociales et politiques.


55% des quelques 20 millions de mètres cube de sable consommés annuellement au Maroc proviennent de l’informel. L’opacité qui entoure les procédures d’octroi des autorisations d’exploitation des carrières encourage le pillage des sables.


Sur les ondes d’une radio marocaine, le ministre de l’Equipement et des Transport Aziz Rabbah a confirmé l’intérêt que porte son ministère à cette autre facette de l’économie de rente : « Nous sommes en train d’examiner le dossier de l’exploitation des carrières à travers touts ses dimensions : sociale, environnementale et économique ».


Au-delà de l’impact environnemental certain, la surexploitation sauvage des carrières représente un véritable gouffre financier pour l’Etat. Uniquement au titre des recettes fiscales, le manque à gagner est estimé à 5,5 milliards de dirhams par an ! Une situation d’autant plus déplorable que les « rentiers du sable » sont assimilés à une véritable mafia en raison des marges faramineuses qu’ils réalisent en toute impunité.


La loi régissant le secteur datant de 1914, les différentes circulaires ministérielles de même que les études d’impact réalisées n’ont été d’aucun secours dans la structuration et l’assainissement du secteur. D’où la volonté de réforme affichée par Aziz Rabbah.


 


Entre réforme et poches de résistance


Il s’agira de dresser la cartographie intégrale des carrières exploitées, en déterminant les sites  et quotas d’exploitation ainsi que les zones où toute exploitation sera interdite pour des considérations environnementales. La réforme prévoit également l’éradication des carrières sauvages et la mise en place d’un cadre incitatif à l’investissement, en privilégiant notamment le volet règlementaire.


Un projet de loi sera soumis au gouvernement dans les semaines qui suivent, le ministre de tutelle œuvrant pour qu’une nouvelle loi sur les carrières soit votée d’ici la fin de l’année au plus tard.


Les ambitions de réforme qui animent Aziz Rabbah risquent toutefois de rencontrer de fortes résistances. C’est un secret de polichinelle au Maroc, l’exploitation des carrières de sable est intimement liée à certains cercles de pouvoir politique et militaire.


Contrairement aux rentiers du secteur des transports, « les lobbies du sable » disposent de puissants moyens. Une forte assise financière mais surtout des réseaux où le politique, l’économique et le social sont fortement liés…


Zakaria Boulahya




 

Zakaria Boulahya