Albi – Une femme sommée d’enlever son foulard par un buraliste

 Albi – Une femme sommée d’enlever son foulard par un buraliste


Lundi 18 décembre. Il est 9h30. Vanessa, habitante d'Albi (commune du Sud-Ouest de 50.000 habitants) depuis l'été dernier, entre chez un buraliste pour venir chercher un colis à son nom. "À peine à l'intérieur, un des employés me demande d'enlever le turban que je porte sur la tête. Il ne savait même pas que je venais pour retirer un colis. J'aurais pu être là pour acheter un paquet de cigarettes. Il était jeune et il semblait gêné. Il m'a juste dit que c'était lesconsignes", explique, encore choquée, au téléphone cette maman de 36 ans.


"Je suis convertie à l'islam depuis 17 ans et c'est la première fois qu'une telle chose m'arrive. Mon visage n'était pas dissimulé. C'est comme si j'avais un bonnet", se justifie dépitée Vanessa. 


Voyant son étonnement, après avoir vérifié la pièce d'identité de la trentenaire, le jeune employé finit tout de même par lui remettre son colis sans insister pour qu'elle enlève son turban. "C'est à cet instant que j'ai aperçu l'affiche derrière lui, mais on ne l'a voyait pas très bien", raconte Vanessa qui demande alors à "mieux la voir". "La responsable est arrivée et m'a dit qu'elle était affichée en grand à l'entrée", précise-t-elle.


L'affiche en question rappelle à la clientèle qu'un "comportement et une tenue correcte sont exigés". Se basant sur "la circulaire du 2 mars 2011 interdisant la dissimulation du visage dans l'espace public", le gérant informe que "pour des raisons de sécurité, le port d'un casque ou d'une capuche, ainsi que toute tenue pouvant dissimuler l'identité ou une arme est interdit dans notre établissement".


Pour Myriam Bouaffasa, avocate au barreau de Paris, le buraliste se "trompe triplement". "Déjà, parce que son règlement sur lequel il se base est appliqué pour un service public. Un bureau de tabac est un lieu privé", rappelle l'avocate. "D'autre part, l'affiche exposée par le buraliste ne montre pas des personnes qui dissimulent leur visage", continue Maître Bouaffasa. "Pour finir, le buraliste refuse un service à une personne qui ne dissimule par son visage. il le fait sur un motif discriminatoire (religion) ce qui est condamné par l’article 225-2 du code pénal". Pour l'avocate, cette "affiche revient tout simplement à interdire toute forme de voile".


Depuis ce matin, Vanessa a appelé plusieurs de ses amis d'Albi. "Ils n'étaient pas étonnés. C'est déjà arrivé plusieurs fois à d'autres personnes. Une femme portant le foulard et un "barbu" ont déjà été refoulés par le passé".


"Ce buraliste est le point relais le plus proche de chez moi. Que va-t-il se passer la prochaine fois ? ", s'inquiète Vanessa. "J'ai toujours respecté la loi. Je soutiens la loi. Si un jour, elle dit qu'on n'a pas le droit de pénétrer à l'intérieur d'un bureau de tabac avec un turban sur la tête, je retirerai mon bandeau", tient-elle à rappeler. "Mais ce n'est pas le cas alors j'aimerais que cette affiche disparaisse".


Joint par téléphone, le buraliste ne souhaite pas faire de commentaires.


Nadir Dendoune

Nadir Dendoune