Le directeur de l’IUT de Saint-Denis, accusé de manipulation contre des profs d’origine maghrébine

 Le directeur de l’IUT de Saint-Denis, accusé de manipulation contre des profs d’origine maghrébine

Le directeur


En conflit avec deux enseignants, le directeur de l'institut universitaire de technologie (IUT) de Saint-Denis est soupçonné d'avoir lui-même introduit des tapis de prière dans le local d'une association étudiante musulmane pour accréditer la thèse d'une emprise islamiste sur son établissement. L’intéressé nie, accusant la direction de l’université de complicité.


 


Conflit ouvert


La police judiciaire (PJ) de Seine-Saint-Denis s'est rendue sur place vendredi, selon une source policière. Elle s'est fait remettre plusieurs pièces, notamment des tapis de prière et une bande-vidéo, après le dépôt le jour même d'une main courante par la direction de l'université Paris 13, dont l'IUT dépend, selon une source proche du dossier.


Depuis près de deux ans, l'IUT est secoué par une violente crise interne qui oppose son directeur Samuel Mayol à deux enseignants du département « techniques de commercialisation ». Avec le renfort de l'association Anticor, qui a porté plainte récemment pour « détournement de fonds publics », M. Mayol les accuse de s'être fait payer indûment des milliers d'heures de cours qu'ils n'ont en réalité pas assurées. Il leur reproche également d'avoir laissé l'association étudiante L'Ouverture faire du prosélytisme religieux, en vendant sans autorisation des sandwichs halal et en dissimulant des tapis de prière.


Depuis qu'il a dénoncé ces dysfonctionnements supposés, ce partisan d'une interdiction du voile à l'université affirme être l'objet de menaces de mort et d'agressions – la dernière en date du 10 octobre – sans que la PJ ait pu jusqu'à présent en identifier les auteurs.


 


Dérive islamiste ou manipulation ?


Selon le texte de la main courante, l'université soupçonne M. Mayol d'avoir lui-même placé une vingtaine de ces tapis dans le local le 6 octobre, afin d'accréditer la thèse d'une offensive islamiste rampante permise par la complicité des deux enseignants, qui sont d'origine maghrébine.


Alors que le local était fermé depuis le 24 juillet, une responsable de l'université a eu la surprise mercredi d'y découvrir « la présence de plusieurs tapis de prière supplémentaires ». Cette découverte a été faite lors d'un état des lieux organisé par M. Mayol qui, dans un courriel adressé le 6 octobre à des membres du personnel, leur a demandé de réaliser un inventaire précis et de prendre des photos.


La direction pense que Samuel Mayol n'en est pas à son coup d'essai et qu'il pourrait être derrière une fausse alerte à la bombe en février 2014 qui avait conduit la police à pénétrer dans le local et à y constater déjà la présence de tapis religieux.


 


Des bandes de vidéo-surveillance accusatrices


À l'appui de ses accusations, la direction de Paris 13 s'est notamment fondée sur l'exploitation des données du lecteur de badge qui commande l'ouverture de la porte du local et des images de la vidéo-surveillance des couloirs de l'IUT. Sur ces images, on voit M. Mayol entrer dans le local avec une sacoche rouge en bandoulière et tenant à la main un sac blanc et en ressortir avec sa seule sacoche rouge.


« Je démens totalement avoir mis quoi que ce soit dans le local de L'Ouverture », a réagi M. Mayol, se disant victime d'une « manipulation abjecte ». Il s'est bien rendu dans le local le 6 octobre, mais pour « y éteindre la lumière ». Quant au sac, il contenait des « t-shirts » qu'il a déposés devant la porte du « bureau du sport » mitoyen. « Il faut savoir que les deux portes sont accessibles par un sas et que les caméras ne montrent que l'entrée du sas », a-t-il argué.


Rached Cherif


(Avec AFP)

Rached Cherif