Macron/Poutine. Pourquoi cette danse du ventre ?

 Macron/Poutine. Pourquoi cette danse du ventre ?

Ludovic MARIN / AFP

A force de vouloir jouer dans la cour des grands, Emmanuel Macron va finir par attraper un méchant torticolis. Après avoir tenté d’arracher sans succès un petit mot gentil sur l’avenir économique de la France avec l’Oncle Sam, à Joe Biden, voilà le président français qui nous ressort son lapin russe du chapeau : une déclaration qui ne mange pas de pain, vu que ce sont les États-Unis qui mènent la guerre contre la Russie, par Ukraine interposée mais qui n’a fait que mettre dans l’embarras les partenaires européens de l’Hexagone.

 

Les médias russes ont d’ailleurs fait leurs choux gras de la déclaration du président de la République française sur TF1 concernant « La future architecture de sécurité européenne qui doit inclure des garanties de sécurité pour la Russie ». Enfonçant le clou, le président français est allé même jusqu’à reprendre l’un des principaux arguments russes qui légitiment l’invasion de l’Ukraine : « Un des points essentiels, ce que le président Poutine a toujours dit, c’est la peur que l’OTAN vienne jusqu’à ses portes, c’est le déploiement d’armes qui peuvent menacer la Russie. Ce sujet fera partie des sujets pour la paix. » 

Dans les bureaux du président des États-Unis Joe Biden, le 1er décembre, Emmanuel Macron était même allé jusqu’à réaffirmer qu’il souhaitait s’entretenir prochainement avec Vladimir Poutine. Ce n’est pas la première fois qu’Emmanuel Macron se fait prendre en flagrant délit de russophilie avérée depuis son appel à « ne jamais céder à la tentation ni de l’humiliation, ni de l’esprit de revanche » face à la Russie. 

Sans oublier son fameux coup de pinceau à Vladimir Poutine reçu en août 2019 au fort de Brégançon, où Macron avait souhaité « réinventer une architecture de sécurité et de confiance entre l’Union européenne et la Russie, cette grande puissance des Lumières qui a sa place dans l’Europe des valeurs auxquelles nous croyons. »

Peut-on en vouloir à Emmanuel Macron de ménager le chou ukrainien et la chèvre russe ? Non, mais ce qu’on peut par contre lui reprocher, c’est de s’être couché à la première semonce américaine concernant l’imposition des sanctions économiques contre la Russie qui finalement ne servent vraiment «à rien». 

Il y a aussi une prétention du président de la république à se croire beaucoup plus malin que tous, y compris ses prédécesseurs. A-t-il oublié l’humiliation subie par Sarkozy au moment où ce dernier a voulu donner des leçons de droits de l’homme à Poutine ? L’homme fort du Kremlin l’avait regardé disserter tranquillement avant de lui couper la parole : « Écoute-moi bien, la Russie, est grande comme ça, en écartant largement ses bras, avant de décrire la France avec quelques centimètres entre le pouce et l’index, et la France est petite comme ça » ! La menace qu‘il a proférée après se passe de commentaire.

Ou bien peut-être qu’on se trompe sur le personnage et voyant que le froid approche, que la Russie est plus puissante qu’avant et constatant que l’Oncle Sam ne lèvera pas le petit doigt pour aider les Français à se chauffer cet hiver, Emmanuel Macron cherche à hâter l’avènement d’une paix qui permettra au gaz russe de circuler dans les chaumières françaises au moment où EDF continue à faire tourner ses réacteurs nucléaires avec de l’uranium russe. Auquel cas, on ne pourrait reprocher à Emmanuel Macron un pragmatisme qui oblige parfois à des postures inconfortables.

 

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Abdellatif El Azizi