A Tanger, les amazigh d’Afrique du Nord s’affirment

 


C’est la Fondation Méditerranéenne de la Culture Amazighe de Tanger qui a été à l’initiative  de la rencontre tenue les 22 et 23 juillet des représentants des amazighs de l’Afrique du Nord. Fait inédit, les Tunisiens y participent pour la première fois de leur histoire. Auparavant, une telle initiative paraissait impensable avec le régime dictatorial sous lequel sévissait la Tunisie.

De plus, cette rencontre qui était essentiellement culturelle, a donné lieu à une déclaration;  la Déclaration de Tanger qui a été cosignée par Ilyass El Omari (Fondation Méditerranéenne de la Culture Amazighe de Tanger), Ferhat Mehenni (Kabylie), Fethi Khelifa (Libye), Khadija Bensaidane (Tunisie), Amani Al Weshahy (Egypte), Thomas Quintana (Islas Canarias) et Ahmed Arehmouch (Maroc).

Il est un fait que la communauté amazighe a grandement bénéficié du printemps arabe qui traverse la région. Des éléments préfigurent la structuration de la culture et l’identité amazighes et par conséquent annonceraient la reconnaissance de l’amazighité.

Le Maroc qui a toujours été précurseur dans ce domaine, se situe en tête de liste par sa nouvelle constitution adoptée par référendum le 1er de ce mois, il reconnaît la langue amazighe comme langue officielle. Il a inscrit dans la nouvelle constitution que « l’amazighe constitue une langue officielle de l’Etat, en tant que patrimoine commun à tous les Marocains sans exception ». La langue amazighe se place ainsi à égalité avec l’arabe en tant que  langues officielles du royaume. En Libye, les amazighs se retrouvent au sein du Conseil National de Transition et sont en train de lutter pour faire valoir leurs droits tels la reconnaissance de la langue. Quant aux Berbères tunisiens,  ils s’organisent pour se faire reconnaître au sein d’un pays en phase de reconstruction politique et sociale. Ils se situent notamment dans le sud du pays à Matmata et à Djerba. En Egypte, ils s’agglomèrent à Siwa et sont plus de vingt mille, ils ont la ferme intention là encore de  faire entendre leurs voix.

Dans tous ces pays secoués par un vent de libération, les peuples amazighs commencent à bouger, ayant pour alliées la démocratie et la liberté. Deux fondamentaux qui placent lesdits peuples au cœur du changement participant avec des propositions concrètes (comme le stipule la déclaration de Tanger ci-dessous) dans les projets de société en train de prendre forme, quoique timidement.

En parallèle à la rencontre de Tanger, un festival multiculturel s’est déployé dans la ville avec au programme des expositions de produits d’artisanat, d’art plastique et des livres amazighs. Une manifestation haute en couleur qui célèbre le patrimoine amazigh comme une constituante fondamentale de l’histoire nord africaine.

Soufia Limam

 

 

La Déclaration de Tanger :

Nous, personnalités amazighes soussignées, venant des divers territoires de l’Afrique du Nord, réunies les  22 et 23 juillet 2011 à l’initiative de la Fondation Méditerranéenne de la Culture Amazighe de Tanger, adoptons la présente Déclaration de Tanger.

Nous sommes mobilisés et déterminés à œuvrer sans relâche à la réalisation de l’unité des peuples nord- africains, sans aucune ségrégation à l’encontre d’une identité, d’une langue, d’une culture ou d’une croyance. La reconnaissance officielle de l’Amazighité en tant que langue, culture et identité en Afrique du nord est une condition inéluctable pour la stabilité, le développement socioéconomique durable. L’Union des peuples nord-africains ne pourra se faire que sur une base fédérale équitable.      
Cette union fédérale s’inscrira à la fois dans la perspective méditerranéenne et africaine et sera le partenaire des grandes puissances et des grands ensembles continentaux du monde dans le respect de ses intérêts et de ses valeurs fondatrices. Située à la charnière de l’Orient et de l’Occident, du Nord et du Sud, du monde musulman et du monde chrétien, elle aura à jouer un rôle majeur en faveur de la paix, de la prospérité, de la stabilité et de la fraternité entre les peuples du monde entier. La liberté, la démocratie et le respect des droits humains, politiques, identitaires, culturels et socio-économiques en seront les règles de fonctionnement.

Pour impulser un début de mise en œuvre de cette déclaration, nous exigeons dès maintenant des gouvernements nord-africains actuels :

-La réouverture immédiate des frontières entre l’Algérie et le Maroc ;

-La reconnaissance du Conseil National de Transition (CNT) comme seul représentant légitime du peuple libyen ;  Et nous revendiquons également du Conseil National de Transition libyen, l’officialisation de   l’identité et de la langue amazighe.

-La reconnaissance des droits linguistiques et culturels amazighes en Tunisie et en Égypte;

-La reconnaissance du Gouvernement Provisoire Kabyle, l’Anavad ;

-La fin de la colonisation espagnole aux Canaries et aux enclaves de Ceuta et Melilla.

 

Soufia Limam