En off, comment les diplomates français voient la situation en Algérie

Des diplomates français réunis les 1er et 2 septembre, lors de la 19e Conférence des ambassadeurs de France à Paris partagent avec les journalistes présents des appréciations « off the record » sur les pays où ils sont accrédités. A propos de l’Algérie, les paroles sont amères, désabusées, voire méchantes, le constat est sans appel.

Lors de cette messe qui rassemble les 181 chefs de mission diplomatique français et les responsables de l’administration centrale du ministère des Affaires étrangères et européennes, des propos anonymes émis par des diplomates en poste dans le Maghreb, révélés en premier par l’hebdomadaire Valeurs Actuelles dans son édition du 8 septembre, ont fait le buzz dans la presse des deux pays et continuent encore de susciter des réactions.

En lieu et place des discours lisses et bien tournés de rigueur dans les salons feutrés de la  diplomatie, les ambassadeurs français réunis entre eux et sous couvert d’anonymat se sont laissés aller aux déclarations fracassantes et aux piques, dressant ainsi un tableau sombre de l’Algérie : «Pays pathétique», un «bloc monolithique», où «deux cents têtes font la pluie et le beau temps ». Des constatations qui ne laissent aucun doute sur l’état de crise dans lequel semble s’empêtrer chaque jour un peu plus le pays, face à un pouvoir et des dirigeants qui « continuent à contresens ».

Dans un contexte régional rafraichi par le printemps arabe, les Algériens ne semblent pas vouloir ou pouvoir suivre les mouvements libérateurs et les vents de réformes imposés par les peuples des pays limitrophes. Traumatisés, ils le sont, sans doute, par la guerre sale qui a fait près de 300 mille morts dans la décennie noire. Du coup, pas de grands changements à l’horizon, du moins pour le moment. Et les diplomates de déplorer : « un peuple tué, qui n’a plus de ressort», dans un pays pourtant « plus riche que jamais ». «Dans le nouveau paysage géopolitique du Maghreb, l’Algérie devient préoccupante. C’est un mastodonte qui va nous gêner» tranchent-ils.

Ces déclarations rappellent à quelques virgules près celles d’un autre diplomate, américain cette fois ci, Robert S. Ford en poste alors à Alger, qui déclare en 2008 dans un câble révélé par Wikileaks que l’Algérie est un « pays plus riche que jamais », mais « à la dérive » que les Algériens sont un « peuple malheureux », que le DRS, les services de renseignements, sont « paranoïaques ».

Ces analyses diplomatiques étrangement similaires faites à quelques années d’intervalle vont-elles interpeller les dirigeants algériens ?

Le 12 septembre, le ministre délégué chargé des Affaires maghrébines et africaines, Abdelkader Messahel a déclaré qu’Alger « avec des traditions en diplomatie et une approche écoutée demeure une capitale visitée ». Il a ajouté en outre que «le monde a beaucoup changé, mais l’Algérie a pu s’adapter grâce aux orientations du président de la République».

Sans commentaire !

Soufia Limam

Soufia Limam