France. Mohammed Mechmache ne lâche rien

 France. Mohammed Mechmache ne lâche rien

Le ministre délégué à l’économie sociale et solidaire Benoît Hamon est venu soutenir le candidat PS Razzy Hammadi à Montreuil. Photo LCDA.


Le candidat indépendant du mouvement Affirmation sur la 12e circonscription de Seine-Saint-Denis continue, malgré la fatigue, son travail de terrain. Hier mercredi, il s’est rendu seul dans le quartier de la Forestière à Clichy-sous-Bois pour faire du porte à porte. Reportage au cœur d’une cité fantôme.




 


« On a hâte que la campagne se termine ». Traits tirés par la fatigue, Mohammed Mechmache garde le sourire à deux jours de la fin de la campagne législative.


Dans l’appartement qui sert de local à son équipe, l’ambiance est au beau fixe. Fatima Hani multiplie les coups de fils pour informer les gens de la grande fête en plein air organisée vendredi à Clichy-sous-Bois. « On n’avait pas envie de faire comme tout le monde, explique Mohammed, un meeting dans une salle. Là ça sera festif, il y aura des groupes du quartier, des stands pour les enfants ».


En attendant vendredi, la campagne continue. Ce soir, direction le quartier de la Forestière à Clichy-sous-Bois pour un nouveau porte-à-porte.


 


Un quartier abandonné


« Nous n’avons pas les moyens des partis politiques. Eux ont des équipes pour afficher, pour tracter le matin, pour faire le porte à porte le soir, pas nous », explique Mohammed Mechmache, venu seul ce soir à la rencontre des habitants de la Forestière. Une cité qui doit être rasée dans les prochains mois. Plusieurs habitants ont été relogés. D’autres vivent dans des conditions inimaginables.


Mohammed est connu comme le loup blanc dans le quartier. Jeunes et mamans qui passent le saluent chaleureusement. « Je les ai vus grandir pour la plupart. Ils sont souvent partis pour les vacances avec notre projet oxygène ».


Vus de l’extérieur, les bâtiments font peine à voir. Entre les fissures et l’humidité, certains étages sont entièrement murés. À l’intérieur, l’ascenseur fonctionne un coup sur deux. Mohammed appuie sur le 6, la porte s’ouvre mais un mur de béton nous empêche de sortir. Direction le quatrième.


Dans le couloir, on peine à trouver une trace de la peinture d’origine noyée sous la masse de tags qui la recouvre. Certains ont même gravé leurs inscriptions au sens propre, n’hésitant pas à faire des trous dans le béton. Un homme ouvre sa porte. Mohammed très souriant lui tend ses tracts : « Bonsoir Monsieur, je me présente pour les élections législatives de dimanche. Sans étiquette, nous voulons représenter les quartiers populaires, récupérer notre voix qui nous a été confisquée ». Très réceptif, le père de famille lui demande : « Vous êtes de gauche ou de droite ? ». « De gauche mais pas affilié à un parti », lui répond Mohammed.


 


« Fier de notre campagne »


La tournée des bâtiments continue. Malgré l’heure tardive, 20h passé, les portes s’ouvrent et personne ne refuse le tract de Mohammed. Pas habitués à voir un candidat venir taper à leur porte, les habitants se réjouissent de cette proximité.


Le travail de terrain semble avoir porté ses fruits. Ils sont nombreux à reconnaître le candidat. « On s’est vu sur le marché », lui lance une jeune femme. D’autres sont mêmes des intimes et proposent à Mohammed de venir prendre le thé. « Désolé je ne peux pas, je dois encore faire tous les autres bâtiments », s’excuse-t-il presque.


L’ascenseur ne fonctionne pas, il va falloir faire celui-ci à pied. Au rez-de-chaussée, un homme d’origine africaine ouvre la porte et prend le tract. Mohammed lui demande s’il y a encore beaucoup de gens qui habitent la tour. « Des Français ? », lui répond interrogatif le locataire. « Non, non, tout le monde », explique le candidat.


Les escaliers donnent une note lugubre à l’ensemble. Tags, manque de luminosité, murs abîmés, urine sur le sol. Des conditions de vie indignes pour ceux qui vivent toujours là et qui n’ont pas été relogés. « Ça leur ferait du bien de venir voir comment c’est ici », avance Mohammed.


Sur les paliers, deux appartements sur trois en moyenne sont condamnés. À certains étages, des portes ont été fracturées, laissant place à des squats de fortune.


Les derniers habitants continuent d’être réceptifs. Le candidat reçoit même de sérieux encouragements. « On va gagner », lui assure un papa en lui serrant la main vigoureusement. « On compte sur vous dimanche », lance le candidat à une grande famille ravie de voir Mohammed.


Durant deux heures, le candidat a avalé les escaliers sans jamais perdre son sourire et sa bonne humeur. Proche des gens, il sent en retour une vraie écoute des habitants. « On pourrait bien faire une surprise dimanche », se met-il à espérer. Fier et heureux de la campagne « que toute son équipe a menée », Mohammed, malgré la fatigue, veut aller jusqu’au bout. « Il faut qu’on n’ait aucun regret, qu’on ne se dise pas, on aurait dû en faire un peu plus ».


Retour au local mais pas question de gamberger. Avec deux équipes, il repart sur le terrain pour faire du collage jusque tard dans la nuit. Un moment important car ses affiches sont victimes de sabotage depuis le début de la campagne. « Ils arrachent uniquement les nôtres, pas celles du FN ou de Raoult ». Mohammed Mechmache veut y voir un signe positif : « On doit leur faire peur, ils se disent qu’on récupère des voix sur leur terrain, pour nous, c’est encourageant ».


Jonathan Ardines




 

Jonathan Ardines