Stains- Le pari réussi de L’Alcazar, restaurant gastronomique

 Stains- Le pari réussi de L’Alcazar, restaurant gastronomique

Mohamed El Marzouki


Ils étaient peu nombreux à croire en leur projet et pourtant ils l’ont fait ! Les frères El Marzouki, patrons de l’Alcazar, restaurant gastronomique de Stains, entament leur cinquième année. Et l’avenir est prometteur. 


Nouvelle rencontre avec Mohamed El Marzouki qui avait confié en 2017 au Courrier de l'Atlas ses espoirs et ses ambitions. 


Les débuts ont été difficiles….


Effectivement, ça n’a pas été simple. Une première année assez difficile où on s'est posé des questions sur la viabilité du projet, en se demandant si on était sur le bon créneau. On a passé de longues soirées à attendre le client qui ne venait pas. Comme nous travaillons avec des produits frais, il nous arrivait de devoir jeter des denrées. Un crève cœur pour nous. Même si c’était très difficile, on  ne s’est jamais dit qu'on allait abandonner. Mais bon, tout ça c’est derrière nous. Avant, mon client, c’était le "vent", aujourd’hui, le vendredi et le samedi, la réservation est obligatoire. 


Quand a eu lieu le déclic ? 


En fait, il fallait juste être patient. On avait bien étudié au préalable notre projet. Si la tendance "bio-frais" marchait à Paris, nous ne voyions pas pourquoi elle ne pourrait pas franchir le périphérique. C’était inévitable, nous étions juste un peu en avance. Les habitants de banlieue sont comme tout le monde : ils aiment la nourriture de qualité. Quand on cherche la qualité, on fait l'effort de se déplacer. Aujourd’hui, notre clientèle n'est pas seulement de Stains, ou de "banlieue", elle est également parisienne.  


Vous n’êtes donc pas surpris de la réussite de votre projet ? 


Pas vraiment, oui. Nous avons misé sur du long terme et sur le Grand Paris. On a beaucoup investi dans ce restaurant, comme dans la qualité des produits, Bio et de saisons. La marchandise est achetée au marché de Rungis mais aussi souvent chez des producteurs locaux. La viande est française, la charcuterie est espagnole, de Séville plus précisément. La carte du restaurant change tous les deux mois et les tarifs restent abordables. On essaie de rendre la gastronomie accessible au plus grand nombre. 


Il y a eu aussi un vrai effort fait pour la décoration….


Après avoir obtenu les clefs, nous avons mis plus d'une année avant d'ouvrir. Nous voulions peaufiner chaque détail. Nous nous sommes inspirés du style de l’Alhambra (NDLR : l'un des monuments majeurs de l'architecture islamique situé à Grenade en Espagne) qui représente l’apogée de l’art andalou.  


A la base, ce n’était pas qu’une histoire de business….


Oui, bien sûr. Si un restaurant n’était qu'une histoire à faire de l'argent, on serait allés investir sur Paris mais pour nous, il s’agissait avant tout d’une aventure et d’un véritable challenge. On voulait contrebalancer l'idée qu'en banlieue, on ne peut ouvrir que des grecs et que les habitants n'auraient pas envie d'autre chose. La surprise serait donc plus à aller chercher de "l’autre côté" : beaucoup ne s’attendaient pas qu’à Stains, en Seine-Saint-Denis, un restaurant gastronomique pouvait marcher. Les clichés ont la vie dure ! 


C’est une belle revanche donc ?


C’est surtout de la fierté. Ils étaient persuadés qu’on allait se planter et ça a renforcé notre détermination. L’important c’est de croire en ce qu’on fait et de travailler pour. J’ai grandi dans une cité à Stains, ça m’a rendu plus fort. Avoir grandi ici m’a appris le goût de l'effort et m'a encouragé à ne jamais lâcher. 


Cet amour pour « la bonne bouffe » vient aussi de vos parents…


Exactement. Mes parents sont originaires du Maroc. Dans les années 70, 80, on mangeait du poisson à la maison.  Ma mère est un cordon bleu. Elle nous a ouvert à d'autres cuisines. On mangeait déjà du fenouil, du gratin de blethe ou de la mozarella, pas juste du tajine ou du couscous. Elle faisait toujours ses courses au marché. Nous ne mangions jamais de plats préparés ou n'allions au Mac do. Cette réussite, nous la dédions d'abord à nos parents. 

Nadir Dendoune