Décès d’Adam Boulifa : deux individus inculpés pour meurtre

 Décès d’Adam Boulifa : deux individus inculpés pour meurtre


L’affaire a mis en émoi l’opinion publique et déclenché un débat de société sur la banalisation de la violence dans le monde de la nuit. Tabassé par les vigiles d’une boite de nuit, le jeune Adam, venu fêter ses 23 ans, a succombé à ses blessures. Une mort que l’on aurait tenté de camoufler par une chute dans une cage d’ascenseur. En attendant la divulgation des résultats de l’autopsie, deux personnes ont été inculpées mercredi pour meurtre avec préméditation, et une troisième de complicité de meurtre.



En plus des caméras de surveillance saisies, les vidéos filmées par les clients ont permis d’établir certaines responsabilités


 


L’avocat du jeune Adam Boulifa, Me Sami Souissi, est notamment intervenu aujourd’hui 20 novembre pour démentir la parution du rapport du médecin légiste, dont ne dispose pas encore à cette heure le juge d’instruction en charge du dossier. Des rumeurs s’étaient propagées hier soir sur les réseaux sociaux relayant des détails sur les circonstances du décès, selon lesquelles la victime aurait eu la cage thoracique brisée, entrainant une hémorragie interne qui a conduit à sa mort.


Les témoignages de sympathie et les messages de condoléances se multiplient depuis la tragédie de la part de riverains de la famille du défunt à Mégrine, banlieue sud de Tunis, mais aussi d’internautes s’identifiant aisément à Adam, « un bon vivant » simplement venu célébrer ses 23 ans au Madisson, un haut lieu de la nuit du centre-ville de Tunis.


Ce bar restaurant de l’hôtel la Maison blanche, Avenue Mohamed V, récemment rénové, a depuis été fermé sur ordre du gouverneur de Tunis, Chedly Bouallègue, au lendemain du décès où sept personnes ont été arrêtées dans un premier temps, en marge de l’enquête. Les autorités ont par ailleurs découvert que comme bon nombre d’établissements de ce type, le gérant louait illégalement une autorisation individuelle de vente d’alcool.  


L’avocat de la défense, celui des agents de sécurité, avait d’abord défendu ce dimanche la thèse d’une chute accidentelle, en marge de la bagarre, dans une cage d’ascenseur en travaux. Mais de nombreux témoignages, dont celui du père de la victime, lui-même tabassé également, laissent peu de place au doute quant aux coups mortels infligé au jeune homme.


Ce dernier se serait plaint de la grossièreté d’un serveur, suite à quoi l’escalade verbale a dégénéré en bagarre générale. Le jeune avait invité son père à rejoindre la fête en fin de soirée pour « prendre des photos », dans ce qui est décrit comme une ambiance bon enfant.  


Lundi, le père a livré un émouvant hommage à son fils, qu’il a été incapable de défendre, dans une séquence qui totalise depuis près d’1 million de vues sur la toile.   


 


Le phénomène du recrutement anarchique


Plus qu’un fait divers, ce véritable électrochoc sociétal, cause de vifs débats entre indignation pour non-assistance à personne en danger et appels à revoir les conditions de formation et de recrutement des portiers et physionomistes.


« Depuis quand les clients interviennent-ils contre les agents de sécurité en pleine intervention ? », tempère un internaute, en réponse à un autre qui s’indigne de l’inaction de la cinquantaine de clients à proximité immédiate de l’incident. D’autres encore saluent le « réflexe civique » de nombreux clients ayant filmé la scène, un geste tellement contemporain mais inapproprié lorsqu’ils se substitue au reflexe du secours, aux yeux de certains commentateurs.  


Appelés ironiquement par certains « diplômés des prisons », les vigiles employés par les établissements nocturnes sont aujourd’hui au cœur d’une nouvelle polémique. Pour Mourad Messaoudi, « il est temps de boycotter tout endroit qui ne respecte pas la dignité de ses clients », l’artiste regrettant l’absence en Tunisie de la culture du boycott.

Seif Soudani