Vient de paraitre : Le Continent du Tout et du presque Rien de Sami Tchak

 Vient de paraitre : Le Continent du Tout et du presque Rien de Sami Tchak

Sami Tchak critique ceux qui se présentent comme les spécialistes consacrés de l’Afrique.

Paru il y a quelques semaines, le nouveau roman de Sami Tchak dresse un tableau des théories approximatives élaborées depuis longtemps sur l’Afrique.

C’est l’histoire de Maurice Boyer, universitaire français né à Poitiers au lendemain de la seconde guerre mondiale. Issu d’un milieu rural et modeste, il arrive à Paris pour entamer des études d’ethnologie à la Sorbonne. Il rêve de suivre les pas de son maître, Georges Balandier.

L’universitaire part pour ses recherches doctorales dans un village du Togo. Il y restera deux ans. Ce sera le grand choc pour cet ethnologue doublé d’un grand voyageur qui s’installe dans une un coin isolé pour étudier tout un continent.  Parvenu à l’âge de la retraite, Maurice Boyer fait le bilan de sa vie. S’il évoque quelques aspects privés, c’est surtout sa carrière d’ethnologue qui compose la trame essentielle du roman.

Accueilli avec d’autant plus d’intérêt qu’il a appris la langue locale, Boyer est initié aux codes sociaux et culturels. Il a vécu des expériences spirituelles et sexuelles et réussit à se faire accepter par la population locale. Il s’intègre au point de « connaître très bien » ce petit bout d’Afrique, c’est ce qu’il croit du moins.

Il en résulte des concepts réels ou bien de pures illusions ? Le Continent du Tout et du presque Rien démontre que prétendre connaître l’Afrique, se présenter comme le spécialiste consacré, s’avère être une chimère. « Tu es venu ici dans la saine intention de nous observer, de nous comprendre, Maurice, mais en vérité, tu continues la grande œuvre occidentale : penser les autres, produire du sens sur eux et les mettre dans la situation des poissons pris dans un filet », dit-t-on à Maurice Boyer.

Un continent ou des miroirs de phantasmes ?

Lui-même ethnologue de formation avant de se consacrer à l’écriture, Sami Tchak formule une critique frontale à l’endroit de ceux qui se présentent comme les experts de l’Afrique, les « africanistes ». A travers son personnage, l’écrivain se raconte en exposant sa propre manière de voir. Il dresse un panorama des grilles de lecture émises à propos du continent africain. D’où les concepts panafricanisme ou encore afro-pessimisme qu’il fait ressortir pour défaire cette tendance globalisante, sans nuance desdits spécialistes du continent.

Qu’est-ce que l’Afrique ? Un continent réel, un concept ou un fantasme développé par ceux qui croient l’avoir compris et cerné ses limites ? C’est à ces questions que tente de répondre Sami Tchak.

Par ailleurs, ceux qui connaissent son œuvre, depuis ses débuts jusqu’à sa récente publication de Fables du moineau en 2020, savent que ses livres déconcertent par leur richesse et érudition.

Outre son style émaillé de saillies, Sami Tachak réussit l’exploit, dans cette fiction, à replacer son histoire personnelle dans une cinquantaine d’années de théories approximatives sur l’Afrique. Il les évoque pour plus aisément les critiquer.

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Mishka Gharbi