Enfants de djihadistes : le cri d’alarme du député EELV, Mounir Satouri

 Enfants de djihadistes : le cri d’alarme du député EELV, Mounir Satouri

Enfants syriens lors de la visite de la délégation en Syrie (crédit EELV)

Depuis 3 ans, la défaite de l’Etat Islamique « bloque » plusieurs femmes et enfants de djihadistes français (dans des camps aux mains des kurdes syriens. Pour l’heure, le président de la République applique une politique du « cas par cas ». Le député européen EELV, Mounir Satouri revient d’une mission au Kurdistan syrien. Il affirme que le Quai d’Orsay a empêché une délégation de parlementaires de rencontrer les françaises et leurs enfants dans les camps. Il appelle à une réaction des autorités sur cette question.

 

Dans un précédent article, nous décrivions le parcours de la fille de Pascale Descamps. Embrigadée par son mari djihadiste, elle est désormais dans le camp d’El Hol avec ses 4 enfants. Bloquée, malade et sans possibilité de rapatriement, elle se retrouve entre les mains des autorités kurdes et yézidis. Sans aucune forme de procès, elle est retenue dans une zone qui n’est pas un Etat à proprement parler.

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Une situation que dénonce aussi le journaliste et reporter de guerre, Chady Chlela. Selon lui, ce sont « 100 000 femmes et enfants de djihadistes, dont une majorité d’irakiennes et de syriennes, qui sont enfermés depuis 3 ans pour une durée indéfinie ». Il déplore les conditions d’hygiène et d’alimentation avec des vies sous une tente à -5° en hiver et à 45° en été. Il explique que l’année dernière, il y a eu « 300 décès d’enfants liés au froid et à la malnutrition ».

Le député européen EELV, Mounir Satouri fait le même constat. Il revient du Kurdistan syrien et de la Rojava avec une délégation composée de la parlementaire européenne Sylvie Guillaume, de parlementaires français (Hubert Julien-Laferrière et Frédérique Dumas) mais aussi de juristes de l’ONG Avocats Sans Frontières France et du Bâtonnier de Paris.  Les députés accusent l’exécutif de les avoir empêchés de se rendre dans les camps.

enfants djihadistes : le cri d'alarme du député Mounir Satouri
La délégation au Kurdistan en Syrie (crédit photo EELV)

LCDA : Avez vous rencontré des femmes et enfants de djihadistes lors de votre mission en Syrie ?

Mounir Satouri : On a tout fait sauf rencontrer dans les camps, les ressortissantes françaises. On a pu échanger avec les autorités du Kurdistan. On a pu avoir accès à deux camps de réfugiés mais on a été interdit de quitter la région du Rojava et de nous rendre dans les camps de Roj 1 et 2. Les autorités françaises ont fait pression sur les autorités kurdes pour qu’on aille pas plus loin.

LCDA : Quelle est la situation des femmes et enfants de djihadistes français sur place ?

Mounir Satouri : Cela fait plus de 3 ans que ces femmes et 200 enfants sont retenus avec la complicité des autorités françaises, sans jugement. Les conditions sont dramatiques et surtout, nous avons une totale indifférence de leur pays, la France. Elles ne sont pas jugées alors qu’elles devraient l’être.

LCDA : Faut il rapatrier ces femmes et enfants de djihadistes ?

Mounir Satouri : Tout nous porte à croire que c’est l’Elysée qui gère ce dossier en direct. Nous demandons que ces femmes et ces enfants puissent revenir en France. Il faut que la justice fasse son travail et que les juges anti terroristes aillent au bout de leurs investigations. Les deux tiers de ces enfants ont moins de 10 ans. A leur majorité, rien ne les empêchera de revenir. Ils ont besoin d’amour et d’une vie plus sereine. Ma crainte est qu’ils se construisent dans le sentiment d’abandon de la France, dans la haine de l’Occident et dans les mains de gens pouvant les radicaliser.

LCDA : La solution passe t’elle par une décision politique en France sur un sujet qui ne fait pas l’unanimité ?

Mounir Satouri : Le Quai d’Orsay a empêché que l’on revienne avec des images. Le débat public doit avoir lieu. C’est clair. Ce n’est pas populaire. Le rapatriement de ces femmes et enfants de djihadistes est un devoir. François Mitterand a pris l’engagement d’abolir la peine de mort malgré l’impopularité.  Sans sa décision, nous aurions continué à exécuter des personnes condamnées. En politique, il faut du courage. On ne gouverne pas qu’avec des sondages.

LCDA : Vous êtes donc opposé à la politique du « cas par cas » appliquée par le président Macron ?

Mounir Satouri : Comme le prévoit la Belgique, je souhaite que l’on rapatrie tous nos compatriotes. Les femmes complices de crimes ou qui en auraient commis, doivent être jugées. Nous avons payé un lourd tribut par les attaques de l’Etat Islamique. Leur but est de s’attaquer à notre état de droit et à nos valeurs démocratiques. Nous n’avons pas le droit de leur concéder cette victoire là. Ca suffit maintenant la politique de l’autruche, des sondages et du cas par cas. Prenons nos responsabilités et appliquons les règles du droit !

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Yassir Guelzim

Yassir GUELZIM

Journaliste Print et web au Courrier de l'Atlas depuis 2017. Réalisateur de documentaires pour France 5.