La Tunisie demande à la France l’extradition de Belhassen Trabelsi

 La Tunisie demande à la France l’extradition de Belhassen Trabelsi

Belhassen Trabelsi, beau-frère de l’ancien dictateur tunisien Zine el Abidine Ben Ali, le 19 juin 2019 à la cour d’assises d’Aix-en-Provence afp.com/Boris HORVAT

L’Etat tunisien a défendu hier 8 juillet devant la cour d’appel d’Aix-en-Provence sa demande d’extradition de Belhassen Trabelsi, beau-frère de l’ancien dictateur Ben Ali, assurant qu’il disposerait des « garanties fondamentales de la défense et du droit à un procès équitable » dans son pays.

Depuis son arrivée en France depuis le Canada où il était fugitif, de nombreux observateurs expliquent qu’une extradition de cet ennemi public numéro 1 en Tunisie serait extrêmement compliquée et peu plausible. Pourtant, le 24 juin dernier, l’avocat général avait requis un avis favorable pour cette demande d’extradition devant la chambre de l’instruction de la cour d’appel.

Une nouvelle audience avait cependant dû être programmée, car l’Etat tunisien n’avait alors pas été convoqué de sorte qu’il y soit représenté. L’Etat tunisien « souhaite profondément que sa demande d’extradition soit acceptée », a déclaré en son nom l’avocat général des affaires pénales du ministère tunisien de la Justice, Jamel Sahaba.

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Face à Belhassen Trabelsi, qui a redit mercredi ses craintes d’être maltraité en Tunisie, rappelant à nouveau l’exemple de trois de ses frères morts en prison entre 2011 et 2020, Jamel Sahaba a assuré qu’il ne serait « soumis à aucun traitement dégradant », et qu’il disposerait « de toutes les garanties fondamentales de la défense et du droit à un procès équitable ». Evoquant les trois frères de Belhassen Trabelsi, le représentant de l’Etat tunisien a aussi assuré qu’ils avaient « bénéficié de tous les soins nécessaires ».

Mais le récent décès en détention de Mourad Trabelsi, écroué à la prison de Mornaguia depuis juin 2012, vient grandement affaiblir ces allégations officielles. L’échec de l’Instance Vérité et Dignité à trouver un arrangement avec l’Etat dans l’autre dossier clé de Imed Trabelsi fut également évoqué par la défense.

 

Trois décennies de prison ferme encourus

Homme d’affaires symbole de l’ancienne mafia proche de l’ancien régime, Belhassen Trabelsi, 57 ans, avait été interpellé en mars 2019 en France. Il y est mis en examen dans une affaire de « blanchiment en bande organisée, recel, usage et complicité de faux documents administratifs ». L’enquête est toujours en cours. Ayant fui la Tunisie lors de la révolution de 2011 qui a provoqué la chute du président Zine el Abidine Ben Ali, Belhassen Trabelsi s’était installé avec sa famille au Canada. Pays qu’il avait quitté en 2016 après le refus d’Ottawa de lui octroyer l’asile politique.

Après son arrestation en France, la Tunisie avait demandé son extradition en vue d’exécuter trois peines d’emprisonnement prononcées par défaut pour un total de 33 années de prison. Ces condamnations visent des délits financiers dont Belhassen Trabelsi aurait tiré un bénéfice de près de vingt millions d’euros, selon les autorités judiciaires tunisiennes.

Les procédures concernent notamment la vente d’actions de la compagnie aérienne Tunisair ainsi qu’un mécanisme de surfacturation au sein de la société Tunisie Sucre. L’avocat général s’en est remis mercredi à ses conclusions du 24 juin.

Le défenseur de Belhassen Trabelsi a quant à lui souligné que leur client avait de nouveau été condamné le 29 juin en Tunisie à 10 ans d’emprisonnement, dans un dossier sur lequel la demande d’extradition ne s’appuie pas, faisant valoir un vice de forme. La décision de la chambre de l’instruction de la cour d’appel a été mise en délibéré au 16 septembre 2020 à 14h00.

Seule estimation sourcée, le classement Forbes de 2008 avait estimé la fortune personnelle de l’ancien dictateur Ben Ali à 5 milliards d’euros. Certains estiment que la fortune du clan rapproché, incluant les Trabelsi, est équivalente à 4 fois cette somme astronomique.

Seif Soudani