Migration : des Italiens résidents en Tunisie lancent un appel

 Migration : des Italiens résidents en Tunisie lancent un appel

Saïed et di Maio lors de la visite de ce dernier à Carthage le 17 août

« L’Italie, en tant que premier partenaire économique du pays, doit repenser ses relations bilatérales avec la Tunisie sur la base des principes de réciprocité, de solidarité et d’égalité, et au-delà de tout objectif de propagande ». C’est ce que demandent les Italiennes et les Italiens résidant en Tunisie dans une lettre ouverte publiée le 20 août qui recueille l’adhésion d’un grand nombre de signataires.

 

Intitulé « Stop à la pression italienne sur le gouvernement tunisien en matière d’immigration », l’appel est notamment corédigé par la bloggeuse Patrizia Mancini qui vit en Tunisie. Avec un groupe d’autres Italiens qui vivent et travaillent dans le pays, ils signent cette tribune destinée aux autorités italiennes.

 

À la suite de la visite éclair en Tunisie du ministre des Affaires étrangères, Luigi di Maio, en compagnie de la ministre de l’Intérieur, Luciana Lamorgese, et des commissaires européens aux affaires intérieures, Ylva Johansson, et à l’élargissement et au voisinage, Olivér Várhelyi, du 17 août 2020, certains citoyens et citoyennes italiens résidant en Tunisie ont souhaité exprimer leur inquiétude face à l’intensification des pressions exercées par le gouvernement italien à l’égard de la Tunisie en matière de migration. Cette dernière visite est en effet organisée quelques jours après la visite de la ministre Luciana Lamorgese, en Tunisie le 27 juillet dernier, pour une rencontre avec le président de la République tunisienne, Kais Saied, sur le même sujet.

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Le résultat combiné des deux visites officielles est vite devenu évident : 11 millions d’euros – économisés dans les caisses du ministère de l’intérieur sur le volet accueil des migrants – seront transférés à la Tunisie sous forme de fonds liés au contrôle de ses frontières maritimes, pour assurer cet « effort supplémentaire » sur gestion des migrations vers l’Italie fortement sollicitées par le ministre Lamorgese, ainsi que pour l’entretien des patrouilleurs, la formation des forces de sécurité, un radar et un système d’information qui alertera rapidement la gendarmerie lorsque les bateaux de migrants sont en mer afin de les bloquer dans les eaux tunisiennes.

D’un seul coup, le système d’accueil, déjà faible en Italie, est affaibli ultérieurement, et les murs contre les migrants qui, dans des conditions déjà très difficiles, embarquent vers l’Italie se renforcent.

Accueillis en Tunisie depuis des années, le groupe d’Italiens et d’Italiennes lance un cri d’indignation contre l’acharnement politique et médiatique dont fait objet la question migratoire en Italie et a dénoncé le diktat « coopération vs lutte contre l’immigration clandestine », annoncé par le ministre di Maio qui se traduit par une tranche de 6,5 millions d’euros destinés à la coopération avec le pays du Maghreb, en attendant qu’ils se prononcent sur le soi-disant « pic des départs ».

La Tunisie, seul pays de la Méditerranée à avoir surmonté, non sans obstacles, les années difficiles de la transition démocratique, est aujourd’hui frappée par une grave crise économique et sociale, accentuée par la crise sanitaire mondiale.

Le texte de la lettre ouverte adressée au ministre des Affaires étrangères, Luigi di Maio et à l’ambassadeur d’Italie en Tunisie, Lorenzo Fanara, est consultable via ce lien.

Seif Soudani