France. Haro sur la taxe Hollande

 France. Haro sur la taxe Hollande

Le monde du football se positionne fermement contre la proposition de François Hollande de taxer les plus hauts revenus à 75%. Photo Fred Dufour / AFP.


La taxe dite Hollande a fait entrer le football français en campagne. La proposition du candidat socialiste a provoqué une levée de boucliers dans un milieu qui craint de perdre en compétitivité et en revenus. A raison ?




 


Toujours frileux, voire indifférent, quand il est sondé sur des sujets politiques, le monde du football s’est découvert une vocation militante. A l’annonce de la proposition de François Hollande de taxer les plus hauts revenus à 75%, dirigeants, entraîneurs, et joueurs, ont pris position fermement.


Le président de la Ligue de football, Frédéric Thiriez, a ainsi considéré que cette mesure provoquerait « la mort du football français ». Tout aussi alarmiste, le président de Lille, Michel Seydoux, a estimé que la taxe ramènerait le football au niveau « associatif ». « Si tuer le foot pro est un choix politique, soit, mais il faut l’assumer »,a-t-il asséné.


Les joueurs n’ont pas été en reste. « On en a parlé entre nous, je ne vous le cache pas », a ainsi reconnu Christophe Jallet, le latéral droit du PSG. « Si on était soumis à ce régime, on aurait forcément l’impression de travailler pour pas grand chose, a-t-il poursuivi. Moi, je n’ai braqué personne pour avoir ce que j’ai ».


«Tous les joueurs en ont parlé depuis quelques jours, a abondé le Bordelais, Mickaël Ciani, C’est un gros débat. Je ne pense pas que les joueurs sautent de joie quand on va leur dire qu’on va leur prélever les 75% ! ».


Comme beaucoup de leurs congénères, Ciani et Jallet semblent toutefois avoir mal compris la proposition du candidat socialiste, estimant que 75% du total de leurs revenus seraient ponctionnés, et pas seulement la tranche excédant le million d’euros annuels.


 


Hollande pique Carlo Ancelotti


Au juste, combien gagnent les footballeurs de Ligue 1 pour tirer si fort la sonnette d’alarme ? 45 000 euros brut en moyenne. Mais certaines stars ne sont pas loin de toucher le million d’euros en deux mois, tel Lisandro Lopez, dont le salaire mensuel est estimé à 450 000 euros.


En clair, ce sont avant tout les gros clubs, et les meilleurs joueurs des écuries moins florissantes, qui seraient touchés par cette mesure. Selon les dirigeants du football français, ce montant de l’impôt dissuaderait de grands joueurs de s’engager avec un club de Ligue 1, et pourrait provoquer un exode des footballeurs les mieux payés vers les championnats anglais, italiens, ou espagnols.


Pris à partie par le monde du football, François Hollande a décidé de réagir, dimanche. « Que les dirigeants de football fassent aussi un peu le ménage : a-t-on un niveau de championnat qui justifie des salaires aussi astronomiques ? », s’est interrogé le candidat socialiste.


François Hollande a illustré sa démonstration par un cas spécifique : « J’ai appris que l’entraîneur ou le directeur sportif du PSG touchait 6 millions d’euros par an : est-ce que le PSG (…) a des résultats tels que son entraîneur devrait être payé autant ? ».


Interrogé en conférence de presse, Carlo Ancelotti lui a répondu qu’il paierait les taxes que l’Etat lui demande, mais que le montant de son salaire répondait à la loi du marché. Une loi justement au cœur des préoccupations d’une bonne partie de la population française, choquée par les rémunérations des dirigeants de grandes entreprises ou par les salaires des footballeurs.


Par sa mesure, dont l’impact significatif sur une meilleure répartition des richesses est contesté jusqu’au sein même du PS, Hollande répond toutefois à la demande d’une majorité de Français pour une intervention accrue de l’Etat dans l’économie.


Ex joueur du club grec de Panathinaïkos, Sidney Govou, a, lui, bien compris que le football ne pouvait se contenter de vivre dans sa tour d’ivoire. Dans le Parisien, le joueur d’Evian est revenu sur son expérience hellène : « J’étais dans ma bulle dans un quartier d’Athènes éloigné du centre-ville. Mais je me suis rendu compte que la situation allait poser problème. Quand on ne paie pas de taxes, d’impôts, comment les finances de l’Etat peuvent-être viables ? Je vis en France, je m’en sors bien, je règle mes impôts, s’il faut payer 75 % de taxation, je suis prêt (…) Toutefois, il ne faut pas stigmatiser ceux qui gagnent de l’argent sous prétexte qu’ils en gagnent. » Une voix discordante dans son milieu. La voix du bon sens ?


Thomas Goubin




 

Thomas Goubin