Boycott des examens du secondaire : le bras de fer

 Boycott des examens du secondaire : le bras de fer

Dans les rues tunisiennes


Au troisième jour de la semaine bloquée du premier trimestre, fixée depuis le début de l’année scolaire du 3 au 7 décembre 2018, plusieurs enseignants du secondaire poursuivent le boycott des examens. Un pourrissement de la situation inquiétant pour le devenir des élèves. 


Alternative syndicale de la dernière chance, ce boycott, le deuxième en deux ans, est organisé pour protester contre la non application de leurs revendications salariales, et ce en réponse à l’appel de la fédération générale de l’enseignement secondaire relevant de l’Union générale tunisienne du travail UGTT. D’autres enseignants ont en revanche décidé de ne pas répondre à l’appel au blocage des examens.


Aujourd’hui des parents et des élèves rassemblés aux abords des collèges et lycées du Grand-Tunis ont exprimé leur indignation et leur mécontentement de la poursuite de cette situation. Certains sont en colère après que leurs fils et leurs filles ont pu passer des examens hier, mais pas aujourd’hui : « C’est inadmissible de faire subir aux enfants de telles perturbations lors d’une semaine déjà suffisamment stressante », peste un parent d’élève.  


« Ma fille a passé toute la nuit à réviser et elle s’est réveillée très tôt pour aller passer son examen. En arrivant on l’informe qu’elle doit rentrer chez elle car son enseignant boycotte les examens… », lance encore un parent.


 


Une situation floue et « insupportable »


« On ne demande plus à nos enfants s’ils ont bien passé les examens ou non, aujourd’hui on leur demande s’ils les ont passés ou pas ! On n’a jamais vécu pareille situation, nous autres qui payons si cher les cours particulier », déclare une parente non sans amertume.


« Le boycott des examens et les mouvements de protestation successifs des enseignants dans le secteur public ne feront qu’encourager les parents à aller vers le privé », a estimé un autre parent qui a qualifié la situation de « complètement anarchique ».


Du côté des enseignants, ce n’est pas non plus la joie. Ils sont tiraillés entre l’appel de la fédération et la satisfaction de leurs revendications d’une part et le souci de passer les examens à leurs élèves et ne pas voir leurs salaires amputés d’autre part, conformément aux menaces du ministère de tutelle.


« D’un côté, j’aimerai que nos revendications soient satisfaites mais en même temps j’aimerais terminer mes examens et éviter le prélèvement sur mon salaire des jours de boycott », déclare ainsi un enseignant.


« Je respecte le droit de mes collègues de boycotter les examens mais personnellement j’ai décidé d’être aux côtés de mes élèves et de leur épargner un stress supplémentaire », souligne un autre professeur. « Moi par contre, je militerai jusqu’au bout. C’est une question de principe et il faut défendre nos intérêts », a renchéri sa collègue.

 


Néjib Sellami, secrétaire général adjoint de la fédération générale de l’enseignement secondaire, a indiqué pour sa part que le boycott des examens a enregistré un taux de réussite « impressionnant » et a lancé un appel aux élèves pour joindre leurs établissements et suivre normalement les cours.


De son côté, le ministre de l’Education, Hatem Ben Salem avait souligné en début de semaine, en marge d’une séance plénière au parlement consacrée à la discussion du budget de son département, qu’il « appliquera la loi » en cas de boycott des examens, appelant la partie syndicale à reprendre les négociations et à ne pas impliquer les élèves dans ces tiraillements.


 


Une dizaine de millier d’élèves ont passé leurs examens


Ben Salem, a déclaré hier que 9700 élèves ont malgré tout pu passer leurs examens, ce qui implique que plusieurs professeurs (une minorité, ndlr) n’ont pas accepté de boycotter les examens conformément à la décision du syndicat de l’enseignement secondaire.


Ainsi parmi les 33 900 examens qui auraient dû être passés depuis lundi, seulement un tiers ont pu se dérouler normalement. Ce qui selon le ministre vient démentir les taux de boycott des examens qui n’auraient donc pas atteint les 80% ou 90% revendiqués par l’UGTT.


En guise de conclusion de ce bras de fer des déclarations et contre-déclarations, Ben Salem a affirmé qu’aucun examen ne sera passé après les vacances hivernales. Il propose en effet aux retardataires de passer les examens dès la semaine prochaine pour éviter que les élèves ne soient pas évalués durant ce premier trimestre. 


Selon le secrétaire général de la même fédération syndicale Lassaad Yacoubi, si ce boycott des examens venait à être répercuté sur les salaires de enseignants, ces derniers se vêtiront de « gilets blancs » pour manifester dans la rue.


 


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Seif Soudani