Tunisie. L’opposition maintient son appel au boycott malgré la révision du projet de constitution

 Tunisie. L’opposition maintient son appel au boycott malgré la révision du projet de constitution

Une coalition de partis d’opposition a réitéré son appel au boycott du référendum du 25 juillet sur un projet de nouvelle constitution en Tunisie. Le président Kais Saied, à l’initiative du scrutin contesté, a fait circuler le 8 juillet une nouvelle version de son projet de constitution. Ce nouveau texte modifie deux des articles ayant suscité les réactions les plus virulentes des détracteurs du président tunisien.

 

Le Front du salut national (FSN), une coalition de formations politiques de différentes sensibilités, dont le parti d’inspiration islamiste Ennahdha, a renouvelé lundi 11 juillet son appel au boycott du référendum du 25 juillet prévu en Tunisie. Et ce, malgré les amendements apportés au projet de constitution par le président Kais Saied.

« Nous appelons les Tunisiens à boycotter un processus illégal, anticonstitutionnel qui vise à légitimer un coup d’État », a dénoncé Ahmed Nejib Chebbi, fondateur et président du FSN. Figure politique de centre gauche, M. Chebbi, 77 ans, estime que le texte du président Kais Saied veut « légitimer un régime présidentialiste. C’est-à-dire le pouvoir d’un seul » homme, via sa nouvelle Constitution.

Lire aussi >> Tunisie. Publication du projet de Constitution: la société civile dénonce un texte archaïque

En juillet 2021, le président tunisien s’est arrogé les pleins pouvoirs en limogeant le Premier ministre et en suspendant le Parlement. Il a finalement dissous ce dernier fin mars, faisant vaciller la jeune démocratie tunisienne, berceau du Printemps arabe. Jawhar Ben Mbarek, membre influent du FSN, a appelé lui aussi « les Tunisiens à rejeter massivement ce référendum ».

 

Des amendements à la marge

« Nous tenons à la Constitution de 2014 que nous considérons comme l’unique Constitution représentative de la volonté du peuple tunisien », a ajouté le professeur de droit. Ahmed Nejib Chebbi a quant à lui jugé que dans le nouveau texte, «la garantie des libertés disparaît. C’est pour moi la quintessence d’une mauvaise Constitution ».

Face aux nombreuses critiques, le président Kais Saied avait publié dans la nuit de vendredi à samedi une version un peu amendée de son projet initial de nouvelle Constitution. La nouvelle mouture introduit la nécessité du respect du « système démocratique » dans deux articles. Le premier porte sur la place de l’islam et l’autre sur de possibles restrictions aux droits et libertés. Pour le reste, Kais Saied n’a pas modifié les grandes lignes du projet controversé, qui marque une rupture radicale avec le système parlementaire en place depuis 2014.

 

Vers un régime dictatorial

Sadok Belaid a critiqué un texte qui pourrait « ouvrir la voie à un régime dictatorial ». Le président avait pourtant placé ce juriste renommé à la tête de la commission de rédaction du projet de constitution. Mais, la nouvelle mouture, comme la précédente, est en effet très différente du projet que sa commission avait remis au locataire du palais de Carthage.

Le projet de Kais Saied prévoit un président exerçant le pouvoir exécutif, appuyé par un chef de gouvernement qu’il désigne et peut révoquer, sans passer par le Parlement. Le rôle du Parlement est fortement réduit ; le gouvernement n’est ainsi pas responsable devant les parlementaires. Une nouvelle chambre des régions est en outre créée pour contrebalancer le poids de l’Assemblée des représentants du peuple (ARP).

Rached Cherif