Algérie. Un nouvel ambassadeur à Paris

 Algérie. Un nouvel ambassadeur à Paris

Saïd Moussi, le nouvel ambassadeur algérien à Paris, nommé par Abdelmadjid Tebboune le 12-07-2022.

Depuis quelques semaines, des bruits de couloir laissaient entendre que l’ancien ambassadeur d’Algérie en Espagne, rappelé en catastrophe par Alger, était pressenti pour occuper le même poste à Paris.

 

Saïd Moussi comme nouvel ambassadeur algérien à Paris, pourquoi pas, mais surtout pourquoi faire ? Que peut bien faire ce diplomate proche du ministre des Affaires étrangères Ramtane Lamamra dont la nomination d’ambassadeur d’Algérie en Espagne, à compter de novembre 2021 avait été stoppée net en mars 2022 après le virage radical de l’Espagne sur la question du Sahara marqué par son alignement inconditionnel avec la position marocaine.

Pour rappel, « L’homme des services spéciaux » comme le surnomme ses détracteurs était proche de Ahmed Gaïd Salah qui avait entamé une vaste reprise en main des représentations diplomatiques algériennes en déboulonnant un à un les hommes de Abdelaziz Bouteflika.

Très sensible, l’ambassade d’Algérie à Paris a bénéficié d’un intérêt accru avec le remplacement de l’ambassadeur Abdelkader Mesdoua par Abdallah Baali et la nomination de Saïd Moussi au poste de consul à Paris, à la place de Mohamed Kebir Addou qui avait payé cher sa proximité avec Abdelaziz Bouteflika qui l’avait nommé wali d’Alger de 2004 à 2013.

A l’époque, même le représentant des services de renseignement à Paris Tarek Amirat avait fait lui aussi les frais de ses liens avec Athmane Tartag, coordinateur du renseignement de l’ex-président, incarcéré lui aussi dans le cadre des règlements de compte de Gaid Salah avec le clan Bouteflika. Après le décès (ou l’assassinat) de Gaïd Salah, beaucoup de personnalités proches des services de renseignement ont préféré faire allégeance au nouvel homme fort du régime.

Plus récemment, le duo Tebboune et Chengriha, complètement dépassé par une politique sans queue ni tête s’en est remis aux ex-hauts gradés des services secrets algériens, pour trouver des réponses adéquates aux sorties intempestives et aux décisions hasardeuses qui ont fini par isoler définitivement l’Algérie, non seulement de son pourtour méditerranéen mais surtout avec les capitales occidentales.

A la manœuvre, le général Toufik, blanchi après son bref passage par la case prison, est désormais celui qui, en compagnie du général Nezzar, conseille la présidence sur la diplomatie underground et sur bien d’autres sujets.

Un autre pro de la barbouzerie algérienne, le colonel Chafik Mesbah, ancien du DRS et conseiller aux affaires réservées du Président Tebboune, et le général Abdelaziz Medjahed, l’actuel directeur de l’Institut des Hautes Études Stratégiques (également un ancien également du DRS), jouent le rôle de conseillers diplomatiques auprès de l’institution militaire.

Cerise sur le gâteau, c’est le général Sid Ali Ould Zemirli ex-chef de cabinet du général Toufik qui est aujourd’hui à la tête de l’ensemble des services du DRS. Il est très proche du général Chengriha.

Selon nos informations, s’il y a un homme qui semble bénéficier du consensus auprès de tout ce beau monde, c’est bien l’actuel ministre des Affaires étrangères Ramtane Lamamra (un ancien, d’ailleurs, du DRS) que l’on prépare à remplacer Tebboune, jugé trop mou par les généraux.

L’agressivité de Lamamra et ses sorties intempestives à l’égard de pays comme l’Espagne qui ont valu d’ailleurs à l’Algérie de se faire tirer les oreilles par Bruxelles, avant que l’ensemble des pays de l’Union européenne n’adopte une attitude commune contre l’Algérie, allant jusqu’à interdire carrément la délivrance des visas Schengen aux Algériens (quelques 95 % des demandes sont refusées dans toutes les représentations diplomatiques de l’Europe en Algérie).

Alors, que peut bien faire Moussi pour éteindre le feu à Paris, au moment où le palais de la Mouradia (et les généraux tapis derrière) tirent sur tout ce qui bouge, se mettant à dos ainsi toute l’Europe ?

C’est vrai que ce fin connaisseur des relations franco-algériennes avait orchestré la rencontre de Tebboune, alors Premier ministre en août 2017, avec son homologue français Édouard Philippe, quand il était numéro 2 de l’ambassade d’Algérie à Paris en 2018.

C’est vrai aussi que Moussi est un intime du chef de la diplomatie algérienne Lamamra, mais la nature des dossiers traités est si sensible (immigration, diaspora, Espagne, UE, économie, passé commun etc.) que quel que soit le niveau de responsabilité et l’expérience de cet ambassadeur, il s’agit là d’une mission quasi impossible.

A moins que la nomination d’un proche des généraux à la tête d’une ambassade aussi névralgique que Paris ne soit finalement qu’un signal néfaste et contre-productif, une preuve de plus de l’exécrable relation avec l’ancien colon, le tout en froide cordialité.

 

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Abdellatif El Azizi