Accord Israël-Émirats : les réactions se multiplient

 Accord Israël-Émirats : les réactions se multiplient

Mohammed ben Zayed Al Nahyan

L’accord Israël-Émirats arabes unis annoncé jeudi en vue de normaliser leurs relations suscite de nombreuses réactions. Une fois signé, l’accord ferait d’Abou Dhabi la troisième capitale arabe seulement à suivre ce chemin depuis la création d’Israël.

Depuis l’annonce de cet accord Israël-Émirats arabes unis ce jeudi par Washington, les réactions se multiplient dans le monde. Le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, a ainsi logiquement salué « une nouvelle ère dans les relations entre Israël et le monde arabe ». En 1979, « (Menahem) Begin a signé la paix avec l’Égypte, en 1994 (Yitzhak) Rabin a signé avec la Jordanie et j’ai le mérite de signer en 2020 le troisième accord de paix avec un pays arabe », a-t-il souligné lors d’une allocution télévisée.

« Lors d’un appel entre le président Trump et le Premier ministre Nétanyahou, un accord a été trouvé pour mettre fin à toute annexion supplémentaire de territoires palestiniens », a annoncé le cheikh Mohammed Ben Zayed al-Nahyan sur son compte Twitter. Le souverain émirati souhaite ainsi donner l’impression d’avoir arraché une concession au bénéfice des Palestiniens.

Mais, cette concession est davantage une suspension qu’une renonciation de la part de l’entité sioniste. La déclaration du cheikh a d’ailleurs été aussitôt nuancée par Benyamin Nétanyahou. Il a évoqué un simple report du projet. « J’ai apporté la paix, je réaliserai l’annexion », a-t-il soutenu lors d’une allocution télévisée.

« La plupart des pays y verront une étape audacieuse pour parvenir à une solution à deux États », a déclaré le ministre d’État émirati aux Affaires étrangères. Il a ajouté que les deux pays allaient ouvrir des ambassades dans « pas longtemps ».

Comme en écho, le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi s’est réjoui de cette annonce. Il salue « les efforts des artisans de cet accord pour la prospérité et la stabilité de notre région ». Il y voit une étape vers la « réalisation de la paix au Moyen-Orient », dans un de ses tweets. L’Égypte est signataire, également sous la tutelle de Washington, du premier traité de paix avec l’État hébreu en 1979.

Hamas et Autorité palestinienne à l’unisson

Pour le mouvement islamiste palestinien Hamas, cet accord « ne sert pas la cause palestinienne » et constitue un « chèque en blanc » pour la poursuite de « l’occupation » par Israël. Même rejet de la part de l’Autorité palestinienne qui appelle à une « réunion d’urgence » de la Ligue arabe. Les dirigeants palestiniens « rejettent ce que les Émirats arabes unis ont fait. Il s’agit d’une trahison de Jérusalem et de la cause palestinienne », a indiqué dans un communiqué l’Autorité palestinienne de Mahmoud Abbas.

De son côté, le ministère iranien des Affaires étrangères a qualifié l’accord de « stupidité stratégique d’Abou Dhabi et de Tel-Aviv ». Il annonce qu’il renforcera « l’axe de résistance dans la région », en référence aux alliés de Téhéran au Moyen-Orient. L’agence de presse publique iranienne Tasnim a jugé « honteux » cet accord Israël-Émirats arabes unis sur la normalisation de leurs relations.

Même colère en Turquie où le ministère turc des Affaires étrangères évoque « une trahison » des Émirats arabes unis. Les Émirats « s’efforcent de présenter cela comme une sorte de sacrifice pour la Palestine, alors qu’ils trahissent la cause palestinienne pour servir leurs petits intérêts ».

 

Satisfaction en Europe et aux États unis

« Cet accord est une étape importante pour construire un Moyen-Orient plus pacifique, plus sûr et plus prospère », s’est félicité le président américain Donald Trump. Il s’attend à ce que « d’autres pays arabes et musulmans suivent la voie » montrée par les Émirats arabes unis. Il affirme même être en discussion « avec d’autres pays, très puissants, très bons, qui veulent la paix » au Proche-Orient. C’est « un pas en avant immense et historique », a ajouté le chef de la diplomatie américaine Mike Pompeo.

Joe Biden, candidat démocrate à l’élection présidentielle américaine, a salué une « étape historique ». L’adversaire de Donald Trump voit dans la décision des Émirats une décision « bienvenue et courageuse ».

Sur le continent européen, aussi, on se félicite de l’état d’esprit qui a permis cette normalisation. Paris espère que « l’état d’esprit nouveau dont témoignent ces annonces doit désormais permettre la reprise des négociations entre Israéliens et Palestiniens en vue de l’établissement de deux États », plaide le ministre français des Affaires étrangères. La décision de « suspendre l’annexion de territoires palestiniens est une étape positive, qui doit devenir une mesure définitive », ajoute-t-il.

A Londres, Dominic Raab, salue « une étape historique qui voit la normalisation des relations entre deux grands amis du Royaume-Uni ». Mais, « il n’y a pas de substitut pour des négociations directes entre les Palestiniens et Israël, seule solution pour parvenir à une solution à deux États et une paix durable », ajoute le chef de la diplomatie britannique.

Cet accord pourrait créer « une occasion pour les dirigeants israéliens et palestiniens de reprendre des négociations substantielles, débouchant sur une solution à deux Etats conformément aux résolutions onusiennes en la matière », a aussi affirmé le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres.

Rached Cherif