BCT : la libéralisation du dinar tunisien devra attendre

 BCT : la libéralisation du dinar tunisien devra attendre

Marouane Abassi

Contesté dans sa gestion protectionniste souvent jugée trop orthodoxe par ses pairs, le gouverneur de la Banque centrale de Tunisie (BCT), Marouane Abassi, persiste et signe : « l’ouverture de comptes bancaires en devises pour l’ensemble des Tunisiens, ce n’est pas pour demain ! », a-t-il réitéré.

Au moment où les appels à plus de flexibilité se multiplient en vue d’un dinar tunisien convertible à terme, Abassi rappelle à qui veut bien l’entendre le statut de souveraineté de la BCT en matière de politique monétaire : c’est donc le statu quo qui prime, dans la mesure où la Banque centrale est appelée à préserver ses réserves en devises. Celles-ci ont d’ailleurs de nouveau atteint récemment la barre fatidique des 90 jours de réserves.

« Toutefois nous sommes pleinement investis et nous aiderons les investisseurs et les entreprises souhaitant s’internationaliser à ouvrir de tels comptes », a-t-il précisé en marge d’un débat organisé à Tunis par la Chambre de Tuniso-allemande de l’Industrie et du Commerce, autour du thème « la Tunisie face aux défis économiques, opportunités, risques-visions et réalisations ».

La même source a ajouté que les efforts sont également déployés dans le cadre du nouveau code des changes afin que les personnes et les entreprises exerçant dans les secteurs des services et des nouvelles technologies ne délocalisent pas leurs activités hors du pays.

 

La politique des étapes

La directrice des opérations de change à la BCT, Raoudha Boukadida, a pour sa part expliqué que l’accès des Tunisiens aux comptes en devises sera possible à certaines personnes mais pas à toute la population. « Nous n’en sommes pas encore arrivés à ce stade. Nous comptons dans un premier temps privilégier les personnes ayant certaines activités professionnelles. Elles pourront grâce aux comptes en devises financer des investissements à l’international, acquérir des biens immobiliers à l’étranger ou encore effectuer toutes autres dépenses courantes ou en capital », a-t-elle souligné.

D’après la responsable, le code des changes actuellement en cours de validation par le gouvernement, permettra de libéraliser le dinar progressivement, compte tenu de « la conjoncture économique assez compliquée du pays ».

Ce nouveau cadre légal va aussi selon elle contribuer à améliorer le climat des affaires dans le pays : les participations étrangères au capital des sociétés établies en Tunisie et opérant dans les secteurs qui ne sont pas encadrés par la loi tels que les TIC, ne seront ainsi plus soumiss à des autorisations de l’institut d’émission. « Cette mesure constitue en soi une avancée considérable qui favorisera les investissements », a estimé Boukadida.

 

Les transferts de la diaspora tunisienne toujours en hausse

S’agissant d’un autre front en lien avec les réserves en devises, on apprenait le 25 juin que les revenus du travail cumulés ont enregistré une légère hausse de 4,7%, passant de 3,4 milliards de dinars, en juin 2022, à 3,6 milliards de dinars, actuellement, selon des données quantitatives, publiées vendredi, par la BCT. En réalité les transferts de la diaspora tunisienne couvrent désormais à hauteur de 97,7% les services de la dette extérieure cumulés, lesquels ont connu une baisse de 9,5%, à 3,7 milliards de dinars, à la date du 20 juin 2023.

Continuant sur leur trajectoire haussière, les recettes touristiques cumulées se sont pour leur part accrues de 53%, pour se situer au niveau de 2 milliards de dinars aujourd’hui, contre 1,3 milliard de dinars, à la même date de l’an dernier. Les chiffres de la BCT ont à cet égard fait ressortir une nette amélioration du volume global du refinancement de 49,5%, à 15,1 milliards de dinars, en date du 23 juin courant.

Rappelons que le volume global de refinancement est généralement un indicateur clé pour les banques centrales : Il représente en effet le montant total de liquidités que la banque centrale fournit aux banques commerciales dans le cadre des opérations de refinancement.

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Seif Soudani