La diffusion d’une photo relance le débat sur la succession de Bouteflika

 La diffusion d’une photo relance le débat sur la succession de Bouteflika

La photo de la rencontre entre Manuel Valls et Abdelaziz Bouteflika a suscité la colère des autorités algériennes. Éric Feferberg / AFP


La récente diffusion d'une photo du président algérien Abdelaziz Bouteflika, 79 ans, où il semble très affaibli a relancé les spéculations sur sa succession et la personnalité qui le remplacera. Toute la semaine, la presse et les réseaux sociaux se sont émus après la diffusion de ce cliché montrant le chef de l'État dans une situation peu avantageuse en recevant le 10 avril le premier ministre français Manuel Valls.


 


Photo-choc


Le président, au pouvoir depuis 1999, présentait un visage livide, les yeux hagards et la bouche ouverte. « La visite de Valls a mis fin à un mensonge », et « les Algériens découvrent un président qui n'est pas en mesure de conduire le pays jusqu'à la fin de son mandat en 2019 », a jugé jeudi le quotidien francophone El Watan.


Le quatrième mandat, remporté le 17 avril 2014 après un amendement de la Constitution ayant fait sauter le verrou de la limitation des mandats, est « de trop », renchérit Liberté. Le quotidien francophone juge « sage » de mettre en oeuvre la procédure d'empêchement réclamée aussi par l'opposition contre le président, qui vit dans sa résidence de Zéralda, à l'ouest d'Alger, transformée en bureau.


 


Encore trois ans de mandat


M. Bouteflika, qui ne se déplace plus, y reçoit notamment les dirigeants étrangers en visite à Alger. Comme ce fut le cas pour le premier ministre français qui a tweeté la photo du rendez-vous. Ce tweet a été qualifié d'« acte désobligeant » par le chef de cabinet de M. Bouteflika, Ahmed Ouyahia, cité dimanche par la presse.


« Le tweet de Valls a eu un retentissement international qui ne restera pas sans suite. Bouteflika va se hâter de proposer un successeur parmi ses proches », estime Rachid Tlemçani, professeur de sciences politiques. Les images diffusées « sont un nouveau révélateur du paradoxe algérien », note de son côté le politologue Hasni Abidi. « Il y a un président qui a des pouvoirs exorbitants qu'aucun autre avant lui n'avait eus, mais on ne sait pas qui les exerce », dit-il.


Le chef de l'État a en effet dissous fin 2015 le Département du renseignement et de la sécurité (DRS), seul contre-pouvoir effectif, après avoir limogé le général Mohamed Mediene, dit Toufik, qui a dirigé cet appareil pendant 25 ans, faisant de lui un État dans l'État. Son éviction a fait de M. Bouteflika un dirigeant à la signature duquel est suspendue la carrière de tout haut fonctionnaire ou gradé.


 


« Le système trouvera son candidat et le fera élire »


Mais sa maladie lui permet-elle d'exercer réellement les pouvoirs conférés par la Constitution ? « On gouverne en son nom », estime le politologue. Pour autant, objecte un diplomate occidental, « il n'y a rien de surprenant » aux dernières images du président. « Tout le monde sait qu'il a des difficultés d'élocution et de mobilité » depuis un AVC qui l'avait conduit en 2013 à un séjour suivi d'une convalescence de près de trois mois dans un hôpital militaire parisien.


Le président Bouteflika a cependant gardé « intactes ses capacités d'analyse », insiste le diplomate qui ne croit pas au scénario d'une succession dans le désordre, ni à celui d'une prise de pouvoir par Said Bouteflika, frère et conseiller spécial du chef de l'État que certains appellent le « vice-président ». « Derrière Bouteflika, il y a la machine des institutions qui fonctionne. Le système trouvera son candidat et le fera élire », ajoute-t-il. « L'Algérie est habituée à sortir des candidats surprise », rappelle M. Abidi.


Rached Cherif


(Avec AFP)

Rached Cherif